4 mai > Roman France

C’est une histoire de famille, mais y en a-t-il d’autres ? Deux frères, Caïn et Abel en d’autres temps ; ici, en ce sud profond, cette nuit de Savannah (Géorgie), en cet été de 1840, Elijah et David. Puisqu’il faut que toujours le mort saisisse le vif, l’un tue l’autre. Il y avait dans cette histoire un peuple, un père, une femme bien sûr, une autre : il y aura un fils et l’avenir promet de durer longtemps. Comme toujours en pareil cas, l’un est tué et chacun meurt, à sa façon.

Comme chacun des trois romans précédents d’Olivier Sebban (mais c’est le premier chez Rivages), Sécessions, fresque familiale où la mythologie côtoie le récit de formation, apparaît comme nimbé d’altière solitude et de la plus noble ambition littéraire. Le lecteur avisé ne sera pas surpris d’apprendre que Pascal Quignard tient Sebban pour l’une des voix émergentes de ce temps. L’auteur applique à son "cher sujet", la judaïté, ses identités contrariées, fluctuantes, un décor qui est bien plus que cela, qui d’une certaine façon "entre en résonance" avec ce motif premier. Ce sera une autre terre promise, l’Amérique, celle du rêve de l’ouest, de la guerre de Sécession, des villes qui s’érigent : Chicago, New York (ce sont peut-être les plus belles pages du livre). Dans une langue qui incline d’abord vers l’onirisme noir de La nuit du chasseur, puis vers l’épopée picaresque juive à la Mordecai Richler, Olivier Sebban est le chef d’orchestre de ce concerto pour très (trop) vieilles colères. Et tout le reste n’est que grands espaces, crimes, châtiments et fil de l’horizon. O. M.

 

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