6 septembre > Récit France > Jean-Claude Guillebaud

Voilà dix ans, Jean-Claude Guillebaud publiait Comment je suis redevenu chrétien (Albin Michel, 2007), récit et réflexion autour d’un "come-back" finalement assez audacieux en des temps où s’annonçaient déjà les radicalités d’aujourd’hui, entre laïcisme et radicalisations religieuses. En cette rentrée, avec La foi qui reste, il dresse en quelque sorte le "bilan d’étape" de ce cheminement erratique où l’espérance et la raison se heurtent trop souvent aux puissantes séductions du refus et du repli sur soi. Comme dans son précédent livre, ample et grave, Le tourment de la guerre (L’Iconoclaste, 2016), Guillebaud s’en remet d’abord en matière rhétorique aux privilèges du style, du reporter qu’il demeure en toutes choses. Son livre sera donc d’abord un état des choses et des lieux, précis, circonstancié. Il semble nous dire que moins que jamais la foi est une "vae victis", mais toujours un risque nécessaire qui s’éprouve douloureusement à l’altérité du réel. C’est dans les textes d’abord, et ceux des écrivains en premier lieu, ceux de cette "grâce malgré tout", Péguy ou Bernanos, qu’il conforte et sécurise son chemin.

Ce chemin, cette recherche sans fin, selon l’auteur, ne doit jamais se targuer d’être une identité en ceci qu’elle est par définition excluante. Refusant plus que jamais toute assignation à résidence comme d’être désigné comme "le catholique de service", Guillebaud livre un plaidoyer à la fois volontaire et équilibré. Souhaitant que soit enfin faite toute leur place aux femmes au sein du monde (ou des mondes) chrétien(s), il regrette dans le même temps ce qu’il appelle "une traque obsessionnelle du religieux", ajoutant : "tout se passe comme si l’on voulait expulser Dieu du paysage français". En cause non seulement les nouveaux croisés de la laïcité, les bons petits soldats ricaneurs de la doxa, mais aussi tous ceux qui de l’intérieur même de leur foi ne la vivent plus que comme une citadelle assiégée. Premier visé, le cléricalisme, cet "esprit de vieillesse" pour lequel l’auteur n’éprouve guère de tendresse. Loin des aveuglements des chapelles, Guillebaud s’en remet à l’esprit de conversation, au doute rédempteur, à la fragilité et à la lumière. Rien de moins. Rien de plus ténu et précieux. Olivier Mony

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