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La jeunesse à l'heure communautaire

Les sites pour la jeunesse sont conçus en fonction des caractéristiques de ce public spécifique, « très volatil mais aussi très enthousiaste » , selon Nicolas Cauchy d'Univers Poche. - Photo OLIVIER DION

La jeunesse à l'heure communautaire

Pour communiquer avec leurs lecteurs, les éditeurs pour la jeunesse utilisent désormais massivement les sites communautaires et les blogs, relayés par l'incontournable page Facebook. Au programme, critiques de livres, forums, mais aussi concours et sondages.

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Par Claude Combet,
Créé le 07.10.2014 à 14h05 ,
Mis à jour le 09.10.2014 à 16h06

On les appelle Lecture-academy.com, Onlitplusfort.fr, Livre-attitude.fr, Lire-en-série.com, Ablogouvert.fr ou Lireenlive.com... Derrière ces sites communautaires portant des noms génériques à la gloire de la lecture se cachent des éditeurs pour la jeunesse qui ont ainsi trouvé le moyen de communiquer sur leurs publications et de toucher leurs lecteurs, ceux de la génération dite "digital native".

Hachette Jeunesse a été le pionnier en juillet 2008 avec Lecture-academy.com, créé pour la sortie de Twilight et pour présenter les grands formats de la collection "Black moon". Gallimard Jeunesse a suivi avec Onlitplusfort.fr en janvier 2009. D'autres comme Michel Lafon (Lire-en-série.com), Pocket Jeunesse (Ablogouvert.fr), se sont lancés dans l'aventure à la fin de 2011 ou au printemps comme Rageot (Livre-attitude.fr, à la fin d'avril). "Lecture-academy.com est né avec le Web 2.0. Nous voulions un fonctionnement communautaire où les lecteurs puissent donner leur avis comme sur Allociné et où l'on puisse leur recommander des livres sur le principe : "vous avez aimé, vous aimerez"", précise Antoinette Rouverand, directrice du marketing d'Hachette Jeunesse Roman-Livre de Poche Jeunesse, qui teste aussi depuis mars un nouveau site communautaire destiné aux garçons, Tixmee.com. A l'inverse, le site d'Albin Michel Jeunesse emprunte son nom à la collection "Wiz" (Wiz.fr), et ceux du groupe Bayard-Milan aux titres des magazines, avec des blogs pour Je bouquine, Okapi, Dlire, Julie, et une page Facebook pour Phosphore. Site, blog, Facebook constituent le tiercé gagnant. Certains éditeurs, tel Hachette Jeunesse, préfèrent un site, d'autres un blog, comme Gallimard Jeunesse ou Pocket Jeunesse. Parfois ils combinent les deux, le site servant de portail au blog et au site-"catalogue", comme Gallimard-jeunesse.com. Mais la page Facebook est incontournable. "90 % des 13-25 ans ont un compte Facebook, et 23 % ont un blog. C'est là que nous devons aller, que nous devons leur apporter du contenu et dialoguer avec eux", déclare Mireille Tyckaert, responsable du marketing de Nathan Jeunesse.

Plutôt que leur marque, les maisons préfèrent mettre en avant la lecture. Ils ne se dissimulent pas vraiment car leur nom apparaît dès la recherche sur Google, ainsi que leur logo sur la page d'accueil. "Nous touchons les 15-25 ans, et ils ne se reconnaissent pas sous une appellation "jeunesse"", précise Céline Dehaine, responsable du marketing de Gallimard Jeunesse. "Les jeunes adultes n'iront pas chercher des informations marquées "jeunesse"", confirme Camille Groelly qui anime le site de Michel Lafon (Lire-en-série.com). Eglantine Sauvage, responsable de promotion chez Rageot, qui a mis sur pied Livre-attitude.fr avec Morgane Rodot, précise : "Nous avons voulu un site qui rassemble toute la production. La littérature réaliste, la littérature "filles" ou la nouvelle collection de thrillers n'entrent pas dans la thématique du site Mondes imaginaires qui existait auparavant. Par ailleurs, la multiplication des mini-sites est trop chronophage : il est plus facile de faire vivre un seul site." Pour alimenter Ablogouvert.fr, Editis a demandé à Natacha Derevitsky, directrice littéraire chez Pocket Jeunesse, en plus du catalogue Pocket Jeunesse, d'ajouter les titres de Territoires (le label fantastique pour jeunes adultes du Fleuve noir), et de choisir dans le fonds Univers Poche, notamment en 10/18 et en Pocket, les ouvrages intéressant les 15-25 ans.

Rassembler

Il s'agit avant tout de créer une communauté, de rassembler les lecteurs autour de goûts communs. Du coup, les sites déclinent les univers : "Filles", "Science-fiction", "Fantastique", "Aventure" pour Lire-en-série.com (Michel Lafon) ; "Frissons", "Emotions", "Imaginaires" et "Récits" pour Livre-attitude.fr (Rageot) ; "Clans" autour des séries Alex Rider, "Les effacés", "Chroniques des temps obscurs" pour le tout nouveau Tixmee.com (Hachette Jeunesse). "Les jeunes ne se soucient pas du titre ou de l'auteur. Ils sont fidèles à un univers", explique Camille Groelly. Le site se doit d'être participatif et interactif : il accueille aussi bien les critiques que des forums de discussions, des commentaires. Les concours et les sondages (deux à trois par semaine pour Lecture-academy.com) permettent à l'éditeur de dialoguer avec ses lecteurs. "Nous leur avons demandé de choisir le titre du volume 4 de Twilight et la couverture, et d'écrire des nouvelles", souligne Antoinette Rouverand. Pour la sortie de l'inédit Quatre filles et un jean, Onlitplusfort.fr (Gallimard Jeunesse) propose aux jeunes lectrices de se prendre en photo avec leurs copines, vêtues d'un jean : la photo la plus amusante fera gagner à toute la bande d'amies une séance de photos dans un studio. L'éditeur a aussi organisé un concours de bandes-annonces pour la série A comme Association. Tixmee.com va encore plus loin dans le participatif, car son contenu se compose uniquement de "challenges" et de jeux. Les éditeurs ne perdent pas pour autant de vue la lecture : Lecture-academy.com, Onlitplusfort.fr et Ablogouvert.fr incitent l'internaute à composer sa bibliothèque idéale, en incluant même des titres parus chez d'autres éditeurs (Ablogouvert.fr).

Chronophages

Très chronophages, les sites induisent de nouvelles méthodes de travail et de nouveaux métiers : les community managers se sont multipliés. Net oblige, il faut alimenter sans cesse le flux, et tous les services de la maison sont sollicités. Un livre américain acheté, des chiffres de vente aux Etats-Unis, une adaptation au cinéma... sont autant d'informations dont les lecteurs sont avides. "Les blogueurs sont toujours en avance, et sont au courant de plein de choses. Il faut les attirer par de l'inédit", confirme Céline Dehaine. "Alors que les adultes visitent régulièrement les sites, les plus jeunes ont un comportement spécifique, très volatil. Il faut aller les chercher, ce que nous permet Facebook. Mais ils sont aussi très enthousiastes, communiquent spontanément et partagent", ajoute Nicolas Cauchy, qui supervise Ablogouvert.fr pour Univers Poche.

Signatures, nouveautés, expositions trouvent leur place dans ce flux. Vidéos, interviews d'auteurs, trailers des films qui vont sortir : la Toile a recours à toutes les technologies et toutes les techniques du journalisme. Ainsi retrouve-t-on sur Livre-attitude.fr les photos des coulisses d'un tournage, un reportage photo sur le Salon du livre de Paris, et la photo du bureau de l'auteur du jour... De vrais feuilletons ! Le système se nourrit lui-même : Gallimard Jeunesse organise chaque année un concours pour recruter de nouveaux blogueurs (avec des liens vers leur site).

Gallimard Jeunesse ou Albin Michel Jeunesse ont l'habitude d'alimenter le site une fois par semaine, tandis que le blog ou Facebook sont animés quotidiennement, parfois par deux ou trois "news", précise Antoinette Rouverand. Incontestablement, l'édition pour la jeunesse a pris un virage technologique. "Chaque titre a une page Facebook qui amène en moyenne 5 à 10 commentaires. La page Facebook de Percy Jackson compte 40 000 fans", note Willy Gardett, qui gère avec Anne Leblond le site et le blog Wiz d'Albin Michel Jeunesse. Lecture-academy.com annonce 100 000 visiteurs uniques par mois, Tixmee.com 10 000 visiteurs uniques le premier mois, et Ablogouvert.fr 20 000 visiteurs uniques par mois. Les pages Facebook de Lecture-academy.fr ont 75 000 fans, celles de Gallimard-Jeunesse 52 000. Forte de ces chiffres, l'édition pour la jeunesse démontre qu'elle a su incontestablement augmenter son audience.

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