4 mars > roman Grande-Bretagne

Kazuo Ishiguro est un écrivain qui prend chaque fois soin de se renouveler stylistiquement tout en explorant les thèmes qui lui sont chers. Paru en Grande-Bretagne en novembre 2005, son dernier roman, Auprès de moi toujours (éditions des 2 Terres, 2006, repris chez Folio), était un chef-d’œuvre qui nous hante encore. C’est peu dire que l’auteur des Vestiges du jour (Presses de la Renaissance, 1990, repris chez Folio) et de L’inconsolé (Calmann-Lévy, 1997, repris chez Folio) surprend et séduit à nouveau avec Le géant enfoui.

L’étonnant opus d’Ishiguro nous ramène à une époque bien lointaine. Dans une Angleterre, qui a connu la guerre, où l’on trouvait alors des ogres. Axl et Beatrice forment un couple de Bretons âgés. Ils résident dans une contrée au bord d’un vaste marécage et d’un souterrain. Leur quotidien est troublé par plusieurs événements : la disparition d’une fillette de 9 ou 10 ans et l’arrivée d’une étrangère aux guenilles noires.

Plus étonnant encore est cette affaire de souvenirs oubliés qui reviennent par bribes. Ainsi, Axl et Beatrice repensent à leur fils, loin d’eux sans qu’ils sachent pourquoi. Ce qui les amène à partir sur les routes, en rase campagne, afin de le retrouver. Le lecteur accompagne les protagonistes du Géant enfoui. Un homme qui appelle son épouse "princesse" et une femme qui trouve difficile de voir ce que recèle le cœur des gens.

Se dirigeant vers l’est, ils s’abritent d’abord dans une villa en ruine, conversent avec un batelier. Plus loin, ils tombent sur maître Wistan. Guerrier en mission pour le roi qui brandit un terrible trophée. Et aussi sur Edwin, Saxon de presque 12 ans, qui affronte tête haute ses adversaires. Avec eux, Axl et Beatrice prennent le chemin de la montagne et d’un monastère où ils espèrent trouver de l’aide et des réponses à leurs questions…

Kazuo Ishiguro se montre une nouvelle fois un maître de l’étrangeté et du mystère. L’écrivain a toujours pris soin de bâtir pour ses romans des décors qui ont une importance capitale. Ce qui est plus que jamais le cas dans Le géant enfoui. Un volume, aussi subtil que puissant, qui tend plus vers La route de Cormac McCarthy que vers l’univers du George R. R. Martin de Game of thrones. On y croisera le fameux Gauvin, chevalier de la Table ronde et neveu du grand roi Arthur, on y craindra une dragonne d’une férocité monstrueuse. Peu à peu, on y verra s’éveiller des pensées depuis longtemps effacées.

Il y a fort à parier que les émotions et les images déclenchées par Le géant enfoui, elles, ne s’effaceront pas de sitôt. Al. F.

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