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L'adaptation audiovisuelle des œuvres littéraires : pratiques contractuelles et contentieuses (II/V)

Leonardo DiCaprio est 'The Great Gatsby' - Photo

L'adaptation audiovisuelle des œuvres littéraires : pratiques contractuelles et contentieuses (II/V)

Première partie 

 

L’écrivain, coauteur de l’œuvre audiovisuelle

Le CPI assimile en son article L. 113-7, l’auteur d’une œuvre « originaire» encore protégée, préexistante à l’œuvre audiovisuelle, aux auteurs de l’œuvre nouvelle. En clair, celui qui a signé le livre dont est tiré le film acquiert automatiquement en droit le statut de coauteur dudit film.

De plus, le CPI considère comme autres coauteurs, aux côtés notamment du réalisateur, et sauf preuve contraire, « l’auteur du scénario », « l’auteur de l’adaptation » et « l’auteur du texte parlé ».

Or, les producteurs demandent fréquemment aux écrivains de participer à l’écriture du film adapté de leur propre roman. Il s’agit là soit d’un appel au talent, soit d’un appel au calme…

Mais, aux termes de l’article L. 121-6 du Code de la propriété intellectuelle, « si l'un des auteurs refuse d'achever sa contribution à l'œuvre audiovisuelle ou se trouve dans l'impossibilité d'achever cette contribution par suite de force majeure, il ne pourra s'opposer à l'utilisation, en vue de l'achèvement de l'œuvre, de la partie de cette contribution déjà réalisée. Il aura, pour cette contribution, la qualité d’auteur et jouira des droits qui en découlent ».

Sauf à ce que celui-ci impose au producteur, à l’occasion du contrat de production audiovisuelle qu’il soit réellement associé au travail d’adaptation, celui-ci sera exclu du processus décisionnel.

Il est également possible de participer à l’écriture du film adapté de son roman en étant promu co-auteur du scénario ou des dialogues du film, le producteur s’assurant par ce faire que les décisions artistiques et techniques ne dénaturent pas son ouvrage.

Il est parfois prévu la faculté pour l’auteur ou ses ayants-droit de se voir soumettre le scénario, voire le nom du réalisateur ou même l’entier casting. Une telle prérogative ne s’arrache qu’à l’occasion d’un rapport de force, au cours duquel, pour une fois, l’éditeur, en raison du succès de son auteur, pèsera lourd dans la négociation..

De même, certains ergoteront sur la mention au générique et ne souhaiteront pas profiter de la – bonne ou mauvaise - publicité qui entoure certains films. C’est ainsi que le spectateur candide, et parfois lecteur, s’interrogera sur le sens des nuances, dont la palette s’étend de «tiré» à «sur une idée de», en passant par « librement adapté ».  

 

Le contrat d’option : outil très pratique des producteurs

En pratique, avant la signature du contrat de cession entre la maison d’édition et la société de production, le producteur à l’initiative du projet d’adaptation se réserve généralement un droit d’option sur le texte. En contrepartie de cette option, il versera à l’éditeur ou, le cas échéant, à l’auteur, un acompte correspondant à une sorte d’indemnité d’immobilisation de l’œuvre.

Cet acompte, qualifié de « minimum garanti », varie, bien évidemment, en fonction de la notoriété de l’auteur et de son œuvre. Il correspond, en pratique, à 10% du montant définitif pour la cession des droits d’adaptation audiovisuelle.

Le droit d’option, qu’on peut qualifier de « promesse unilatérale de cession de droits », accorde au producteur un droit de préférence sur l’adaptation du livre à l’écran pendant une durée prédéfinie, le temps de la recherche des financements nécessaires à la production de l’adaptation, mais aussi de la transcription de l’ouvrage en scénario.

A ce stade, le producteur peut déposer au registre des options le titre de l’œuvre littéraire en question, afin de rendre le projet d’adaptation public pendant cette période intermédiaire. Dans ce cas, le producteur devra remettre au Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) une copie du contrat d’option, et justifier du versement des sommes dues au titre de ce contrat.

         Si le projet est avorté, faute de financement par exemple, l’absence de levée de l’option avant le terme stipulé dans le contrat rendra le contrat de cession des droits d’adaptation audiovisuelle caduc. Cela emportera ainsi la « libération » du titulaire des droits, qui pourra alors disposer à nouveau de ses droits d’adaptation et s’adresser librement à un autre producteur. L’indemnité d’immobilisation est, bien entendu, conservée par le titulaire des droits.

La levée de l’option, quant à elle, emporte conclusion du contrat de cession des droits d’adaptation audiovisuelle. En pratique, ce contrat est négocié et rédigé dès la conclusion du contrat d’option auquel il sera annexé, de sorte que la simple levée d’option et signature des parties rendra la cession effective. Le minimum garanti est alors considéré comme une avance sur les redevances proportionnelles à l’exploitation de l’adaptation cinématographique.

(à suivre)

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