DISPARITION

Auteur prolifique pour la jeunesse, Bertrand Solet est mort le 4 février, à l'âge de 83 ans. On lui doit plus d’une centaine de livres, principalement des romans historiques et engagés, abordant souvent les dérives du monde d’aujourd’hui.  

Né le 20 août 1933 d’une famille d’émigrés russes, de son vrai nom Bertrand Soletchnick, Bertrand Solet a attrapé la poliomyélite pendant la guerre et s’est retrouvé orphelin en 1944. Il fait des études de cinéma, de journalisme et d’économie. Responsable du service de documentation d’une société de commerce international, il voyage dans le monde entier et milite pour la fraternité, la culture et le progrès.

Des pans de l'histoire ignorés par l'édition jeunesse

Après son premier livre Jehan de loin, paru chez Delagrave en 1968 (réédité au Livre de Poche Jeunesse en 1987), il écrit pour les jeunes et "aborde des situations historiques ignorées de l’édition pour la jeunesse" note Bernard Epin, dans le Dictionnaire du livre de jeunesse (Editions du Cercle de la librairie, 2013). Ainsi, il traite de la Commune dans Bastien, gamin de Paris (La Farandole, 1968, Syros,1997), de la révolte des esclaves et Toussaint Louverture dans Les révoltés de Saint-Domingue (Laffont, 1969, Flammarion, 1994), de l’affaire Dreyfus dans Il était un capitaine (Laffont, 1972, Le Livre de Poche Jeunesse, 1979), ou les enfants de l’Assistance publique avec Les cahiers de Baptistin Etienne (Editions de l’Amitié, 1972, Le Livre de Poche Jeunesse, 1980).

Sensible aux combats d’aujourd’hui, une partie de son œuvre traite de sujets graves comme la torture dans L’histoire de Manolo (Syros, 2003), les persécutions raciales contre les Tsiganes dans Trafics (Flammarion, 2004) ou l’immigration africaine avec Les chemins de Yélimané (Le Livre de Poche Jeunesse, 1995). "Son rapport à l’Histoire est partie prenante de ses engagements moraux, citoyens: justice sociale, lutte incessante contre le racisme et les discriminations, témoignages pour éclairer aujourd’hui" témoigne Bernard Epin, dans un texte hommage suite au décès de l’écrivain.

Travail militant

Bertrand Solet avait aussi contribué à mettre sur pied la Charte des auteurs et illustrateurs pour la jeunesse. L’auteur Christian Grenier, raconte sur le site de la Charte: "Ma première rencontre avec Bertrand date de 1972, à la Ligue de l’enseignement. Lors de la naissance de La Charte, en 1975, Bertrand fut d’abord opposé à sa création: s’il reconnaissait "œuvrer pour une littérature jeunesse de qualité", il refusait d’être rémunéré pour intervenir dans les classes: admiratif du travail des bénévoles (critiques, organisateurs de salons, enseignants) qui défendaient la littérature jeunesse, il jugeait que ces rencontres faisaient partie de son travail militant – une position tout à fait respectable, qu’il modifia par esprit syndical puisqu’il rejoignit bientôt nos rangs. Tous les auteurs jeunesse croisaient Bertrand chaque année au salon de Montreuil (il vivait à Montreuil !). Malgré sa taille modeste, on le repérait de loin, grâce à sa démarche claudicante - mais décidée ! - accompagné de son épouse Monique. Chacun pouvait apprécier sa franchise, son optimisme, son caractère volontaire et la hardiesse de ses engagements, auxquels il resta fidèle sa vie durant".

Tandis qu’André Delobel, secrétaire général du CRILJ (Centre de recherche et d'information sur la littérature pour la jeunesse), écrit à son propos : "Ecrivain "pédagogue", auteur de près de 150 ouvrages à l’écriture efficace, Bertrand Solet aura fait connaître aux jeunes lecteurs des pans entiers de l’Histoire et, assez souvent, d’une Histoire pas enseignée à l’école. Il les aura aussi, offrant de solides fictions, fait réfléchir à quelques-unes des questions qui empoisonnent le monde".

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