2 avril > Essai Pays-Bas

Après Pasolini (L’évangile selon saint Matthieu), Scorsese (La dernière tentation du Christ), Mel Gibson (La passion du Christ), Paul Verhoeven avait voulu son film sur Jésus. Mais le réalisateur néerlandais de RoboCop ou Starship Troopers ne se serait pas contenté du premier scénario hollywoodien venu. Désireux d’approfondir son sujet, il suit le Jesus Seminar, cercle d’exégètes du christianisme fondé par le théologien américain Robert Funk.

Le projet verra le jour mais sous forme littéraire. Jésus de Nazareth est le fruit de ses cours au Jesus Seminar mêlé aux réflexions originales du mathématicien sceptique devenu cinéaste. L’essai a pour ambition de "ramener le récit mettant Jésus en scène dans ses proportions quotidiennes". Paul Verhoeven évoque sa "profonde crise spirituelle" qui lui fit presque renoncer au cinéma. En réaction, il allait réaliser "des films ultra-réalistes qui [l]’ancr[er]aient dans la réalité". Cela dit, l’hétérodoxe n’entend pas jeter le bébé avec l’eau du bain : ce n’est pas parce que Jésus, à ses yeux, n’est certes pas le fils de Dieu que le message qu’il porte n’est pas bon : l’image de Dieu en l’autre, la bonté vers laquelle chacun doit tendre. C’est le Nazaréen redescendu sur terre - un rebelle sans doute fils d’une mère célibataire, élevé par un charpentier, ayant vécu au temps de la Palestine romaine - et jamais ressuscité - les oripeaux de la divinité dont l’ont revêtu les évangélistes et les premiers pères de l’Eglise sont de la com’ imaginée par ces véritables "spin doctors" de la foi.

Paraboles (Verhoeven salue la technique narrative au détachement "brechtien"), et miracles (de simples exorcismes) sont passés au tamis du réalisme. Au final, Jésus, c’est le Che Guevara de Galilée, fustigeant les prêtres de l’institution (le Temple) et voulant redistribuer aux pauvres : "Il est plus facile à un chameau de passer par le trou d’une aiguille qu’à un riche d’entrer dans le royaume de Dieu" (Matthieu 10,24). Que les adorateurs du Veau d’or de la finance se le tiennent pour dit. S. J. R.

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