ÉTUDE

Contrairement à ce que la fluidité de leur contenu dématérialisé pourrait laisser croire, l’exportation de livres numériques n’est finalement pas plus simple que celle de leur version imprimée. L’édition française peut certes se diffuser dans l’ensemble de l’Union européenne, de même qu’aux Etats-Unis et au Canada. Mais "pour plusieurs régions du monde, les difficultés de sécurisation économique ou de protection des fichiers conduisent à une absence totale ou partielle de disponibilité. C’est le cas par exemple de l’Afrique francophone", note le Bureau international de l’édition française (Bief) dans une "enquête sur les blocages et leviers de développement" pour "l’exportation de livres numériques français". L’accès reste difficile même dans les départements et régions d’outre-mer.

En fonction du potentiel de marché, mais aussi de la sécurité juridique et technique locale, un éditeur ou son diffuseur autorise un revendeur à commercialiser des livres dans certains pays, à condition que l’acheteur soit identifiable via l’adresse IP de son terminal, le code de sa carte bancaire, et son adresse de facturation. Pour les départements d’outre-mer, le rattachement à d’autres codes régionaux proches décidé par un opérateur suffit à bloquer l’accès.

L’impossibilité de verrouiller juridiquement les contrats pour conserver la maîtrise du prix, notamment aux Etats-Unis, dissuade aussi certains éditeurs d’ouvrir la vente sur ce marché, d’un potentiel pourtant indiscutable.

La gestion complexe de multiples taux de TVA en Europe et celle des devises hors de la zone euro supposent des moyens techniques que seuls quelques grands revendeurs (Apple, Amazon, Google, Kobo) peuvent financer. Le libraire interrogé dans le cadre de l’enquête du Bief "renonce et préfère restreindre les ventes à la France". Les groupes peuvent aussi confier à leurs filiales locales la gestion des droits numériques, ce qui complique la tâche des revendeurs.

L’export est pourtant devenu une source de revenus importante pour les éditeurs américains et britanniques, qui profitent de l’expansion de l’anglais dans le monde. Le potentiel est aussi appréciable en Afrique francophone. Mais, outre la crainte du piratage, il faudrait appliquer des tarifs adaptés au niveau de vie de la région, au risque de créer des distorsions avec ceux pratiqués en France.

Hervé Hugueny

19.02 2016

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