Le bilan de la fréquentation du Salon est tombé. Dans un contexte de diminution globale de la fréquentation (-8%), le nombre de jeunes (moins de 18 ans et étudiants dont l’entrée est gratuite) a fortement baissé (-30%). Le salon perd donc de son attractivité immédiate particulièrement auprès des jeunes générations. La lecture deviendrait-elle une pratique de « vieux » ? Les jeunes seraient moins nombreux à vouloir consacrer de leur temps à visiter les livres. Pourtant des efforts ont été déployés pour attirer cette frange de la population : Escale BD, Village Manga, club jeunesse, Lectures de dem@in , etc. Ces initiatives auront peut-être satisfaits les jeunes scolaires mais la proposition n'a visiblement pas séduit les jeunes en dehors du cadre scolaire. Parallèlement à l'érosion de la fréquentation libre du salon par les jeunes, on assiste à une augmentation des visites de classes qui ont augmenté de 14%. La conjugaison de ces deux évolutions confère au salon un parfum scolaire. La lecture (entendue au sens de lecture de livres) apparaît comme une pratique pour laquelle les professionnels du livre (et plus largement les adultes) se mobilisent et sont prêts à payer (cf. les Chèque-Lire donnés aux scolaires). Les jeunes ne seront pas sans percevoir une telle évolution qui pourrait avoir pour effet de l'alimenter : la lecture comme la visite au Salon du livre relèvent d'activités scolaires. L'Ecole ne se contente pas de scolariser certaines lectures ou de contraindre à lire certains titres, elle cherche à prescrire la lecture-plaisir. Elle impose comme évidence le plaisir de la lecture de livre. Dès lors, comment faire de la lecture une activité personnelle si toute lecture est valorisée par l'école ? Que reste-t-il de la transgression par la lecture ? La transgression ne risque-t-elle pas de se situer dans le refus de la lecture de livres et de ce qu'elle incarne ? La scolarisation de la pratique ferait-elle le terreau du discrédit des lecteurs et autres « intellos » ? La lecture d'écrans serait un succès chez les jeunes car c'est elle qui symbolise et permet d'actualiser l'aspiration des jeunes à définir leur propre culture. Que l'Ecole ait pour mission de transmettre la compétence de lecture (au sens de déchiffrement du texte) c'est une évidence, qu'elle s'oblige à donner des repères littéraires pourquoi pas ? Mais la prise en charge de la totalité de la pratique comporte sans doute des limites dans la mesure où elle risque, paradoxalement, d'entraver l'appropriation personnelle de la pratique par les jeunes et ainsi de compromettre son propre objectif, la transmission de la lecture de livres. Pour apprendre à traverser la rue à un enfant, il faut finir par lui lâcher la main...
15.10 2013

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