Photo PHOTO OLIVIER DION

Alors que l’irruption d’Internet et des multiples applications de la révolution numérique bouleversaient l’économie des échanges dans l’édition mondiale, la Foire de Francfort était, il y a une douzaine d’années, donnée pour morte à brève échéance. La communication instantanée et les transferts de fichiers informatiques ouvraient de nouvelles perspectives. A quoi bon trimballer à grands frais, jusqu’aux berges embrumées du Main, des équipes d’éditeurs et de responsables de droits, des caisses de livres et d’épreuves quand un simple mail est si vite envoyé ? La contraction des marchés et la restructuration de pans entiers de l’édition autour des produits et services en ligne achevaient, à la fin des années 2000, de fragiliser la manifestation. Des exposants ont réduit le nombre et le temps de présence de leurs collaborateurs. En 2016 pourtant, la foire cardinale de l’édition mondiale, dont la France sera l’invitée d’honneur l’an prochain, fait mieux que résister. Elle a subi pour cela deux transformations.

D’une part, tout en y réaffirmant la centralité du livre et des éditeurs, les organisateurs de la manifestation n’ont cessé d’y étoffer leur escorte d’imprimeurs, d’acteurs du numérique et de l’audiovisuel ou encore de galeristes, y adjoignant cette année les musées. D’autre part, puisque la plupart des "hot books" sont désormais dévoilés par les agents dans les semaines qui précèdent le grand rendez-vous d’octobre, ils ont par divers moyens renforcé son caractère de lieu de rencontres et d’échanges professionnels. Ces dernières années, conférences et débats se sont multipliés dès avant l’ouverture officielle. Un "business club" a été créé pour faciliter la chose et, pour la première fois cette année, le LitAg, le centre des droits, s’est ouvert au-delà des agents dès le mardi, concurrençant les bars des fameux hôtels Frankfurter Hof ou Hessischer Hof.

Les éditeurs eux-mêmes témoignent de l’évolution du contenu de leurs rendez-vous avec leurs partenaires étrangers qui continuent de remplir leurs journées au rythme de 30 minutes par interlocuteur. On parle moins des contrats et plus des livres. On échange sur ses goûts pour faciliter les collaborations ultérieures. On confronte les expériences pour faire évoluer ses pratiques. Francfort, le salon où l’on cause ? On y observe en tout cas une société structurée par le Web 2.0 renouer avec l’esprit des salons littéraires du XVIIIe siècle.

28.10 2016

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