La médiathèque est toute neuve, des moyens ont été dépensés pour offrir un lieu spacieux aux habitants de cette intercommunalité lorraine. Le mobilier est esthétique et assez fonctionnel. Un cybercentre est intégré dans la médiathèque. Et pourtant, les usagers peuvent trouver motifs à se plaindre et/ou à renoncer à ce cadre privilégié. Les normes imposées par l'institution en matière d'usages d'Internet sont très strictes : interdiction de tout téléchargement, bloquage de tout paiement en ligne, accès impossible à Dailymotion ou Youtube, messagerie instantanée bloquée ainsi que Skyrock Blog , etc. Pour les internautes réguliers, ces multiples restrictions d'usage entrent en totale contradiction avec leurs manières d'utiliser Internet. La médiathèque leur propose de revenir à Internet avant le haut débit voire pire encore ! La liberté d'usage propre à Internet est profondément remise en cause...   Pour les internautes qui auraient envie de se familiariser avec cet espace d'information et de communication, ces interdits offrent une piètre image d'Internet ! Mais alors pourquoi tant de contraintes pour l'usage de cet espace de liberté ! La responsable du service met en avant une rafale d'arguments. Certains sont d'ordre technique : le téléchargement, la consultation de vidéos sont gourmands en bande passante qui est trop faible pour satisfaire tous ces usages. Les virus et messages indésirables se nourrissent de l'usage laxiste des internautes. La médiathèque ne doit pas en pâtir. Un argument moral est aussi convoqué : les vidéos visionnées par les usagers du cybercentre peuvent être vues par les visiteurs (y compris jeunes) car les écrans sont tournés vers l'intérieur de la médiathèque et la cloison est vitrée.   Le risque paraît assez limité et il est toujours possible d'intervenir ponctuellement en cas de dérive mais le choix a été fait de bloquer toute vidéo ! Un autre argument consiste à mettre en avant la mission intrinsèquement éducative de la médiathèque : « on est quand même dans une médiathèque, c'est presque gratuit donc... » certains usages peuvent être proscrits. En matière culturelle, la gratuité impliquerait l'ascétisme c'est-à-dire le renoncement aux pratiques viles que le commerce alimente et prend en charge... En réalité, Internet est en lui-même très ambigu : une même vidéo peut relever de logiques très différentes. Par exemple : on peut regarder une vidéo de recette de cuisine pour la réaliser à domicile, dans un cadre professionnel ou par goût de la dérision ou par curiosité pour un type de cuisine particulier, etc.   Mais l'argument majeur est plus étonnant : la médiathèque est un service gratuit, il ne peut donc pas être complet et si les usagers veulent un tel usage, ils peuvent toujours se rendre dans un cyber café qui est payé pour faire face à d'éventuelles déconvenues. Ce raisonnement est étrange car il fait du service public un sous-produit des services marchands. La valeur d'un service est proportionnel à son coût pour l'usager. C'est ne pas voir que le cybercentre coûte cher à l'agglomération et plus largement la collectivité (DRAC, Conseil Régional, Conseil Général) même si l'usager ne paie rien. Appliqué au domaine de la santé, c'est dire que l'Hôpital public devrait laisser les cas compliqués aux cliniques privées...   Tout cet argumentaire témoigne en tous les cas d'une primauté attribuée au point de vue de l'institution par rapport aux demandes concrètes des usagers. Ceux-ci peuvent voir leurs demandes ou attentes se fracasser sur les principes imposés par l'institution. L'usager est prié de se réjouir des services que celle-ci consent à lui fournir. Une vieille idée dans une médiathèque toute fraîche et pour des nouvelles technologies... Le passé a de l'avenir !
15.10 2013

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