On est ici dans l’appartement de ma belle-mère. Si elle voyait ce bazar…" Pierre-Jean Balzan zigzague entre les cartons et piles de livres qui jonchent le sol du capharnaüm qui sert de bureau aux éditions de la Fosse aux ours, qu’il a créées à Lyon voilà vingt ans. "Et encore, je reçois les manuscrits directement au siège social, c’est-à-dire chez moi." Un immeuble à deux pas, au bord du Rhône, où se situait auparavant un square circulaire en creux, une fosse.

Il faut remonter à 1997, pour s’imaginer un juriste en office HLM de 33 ans, qui quitte son boulot pour accomplir son rêve de toujours. "J’avais lu un traité d’édition qui préconisait de démarrer avec 300 000 francs. Je n’en avais pas le dixième. Mais je me suis lancé quand même, seul, faisant le tour de France des librairies avec mes premiers livres. Au bout d’un an, je recommençais à passer des entretiens pour retrouver un vrai boulot… C’est alors que Michel Polac a parlé de Mon grain de sable sur France Inter. J’allais pouvoir continuer." Cette instabilité est encore de mise aujourd’hui, surtout avec des tirages en baisse. "Je publie quatre ou cinq livres par an, je suis toujours à la recherche du bouquin qui me fera tenir jusqu’à l’année suivante. Alors, quand je ne vends pas, j’hiberne. D’ailleurs, je ressemble de plus en plus à un ours. Je grossis, je grogne comme Clint Eastwood dans Gran Torino."

Il exagère un peu, cet ex-rugbyman dont le regard pétille quand il appose les autocollants, représentant un tableau ou une photo, sur les couvertures unies de ses ouvrages. "Je suis encore tout excité quand je reçois la livraison de l’imprimeur", avoue-t-il. Mais pourquoi la maison - qui compte 130 titres au catalogue, dont les droits d’une vingtaine ont été vendus en poche - ne s’est-elle pas davantage développée en vingt ans ? "J’aime bien tout contrôler, j’aime travailler avec les auteurs et les libraires. C’est tout. Le développement ne m’intéresse pas en soi. L’édition est pour moi un mode de vie." d

19.05 2017

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