22 octobre > Essai Russie

Léon Chestov- Photo DR/LE BRUIT DU TEMPS

Albert Camus appréciait Léon Chestov (1866-1938). Chez le philosophe russe, il aimait la clarté de la langue et la limpidité de la pensée. On en aura la démonstration dans ces trois textes consacrés à la politique. Le premier, Qu’est-ce que le bolchevisme ?, a été publié en 1920 dans Le Mercure de France durant son exil parisien. Trois ans après la révolution d’Octobre, Chestov fait le bilan d’un élan raté. Proche de Nietzsche et de Dostoïevski, il comprend immédiatement que cette révolution est confisquée. Lénine aurait confié avoir fait une "révolution de salauds" pour renforcer la bourgeoisie et écraser le peuple. "Il a trompé les monarques, il a trompé les classes dirigeantes de l’Europe, il a trompé les socialistes russes qui ne connaissent rien aux affaires gouvernementales."

Dans le deuxième, Les oiseaux de feu (1918), Chestov, un rien anarchiste, fait preuve de la même acuité politique. En substance, il considère que les Russes ont vu ce qui allait se passer, ont tout prévu et par conséquent ont voulu ce qui s’est produit. Le troisième, Les menaces des barbares d’aujourd’hui (1934), ne concerne plus les communistes. Chestov désigne Hitler et les nazis - "Autrefois, les barbares venaient de l’extérieur, alors que maintenant, ils surgissent pour ainsi dire de l’intérieur" - et pourfend le chômage, "ce fléau du monde contemporain".

A le lire, on comprend mieux l’histoire de la Russie. A la différence du Français qui se trouve charmant, de l’Anglais qui se croit organisé et de l’Allemand qui estime posséder la science, le Russe "ne sait rien et ne veut rien savoir, et c’est de là que découle sa foi en lui-même". L. L.

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