4 janvier > Roman Belgique > Myriam Leroy

Vingt ans après leur traumatique rupture, une jeune femme se souvient d’Ariane pour qui elle a éprouvé une violente passion amicale, entre 12 et 14 ans, dans la Belgique provinciale du milieu des années 1990. Au départ, tout sépare ces deux préadolescentes : leur milieu, leur apparence, leur statut au sein de l’"école de riches" de Nivelles, dans le Brabant wallon au sud de Bruxelles, où la narratrice a été inscrite par ses parents, issus de la classe moyenne et dont la fille aînée méprise la vie pingre et les désirs d’ascension sociale. Ariane est magnétique. Sa beauté brune, spectaculaire. D’origine indienne, elle a été adoptée enfant et sa famille qui appartient à la bourgeoisie huppée n’est pas moins fascinante. Première de la classe, elle est tout ce que sa condisciple n’est pas : populaire, affranchie, sûre de sa séduction. Partagée entre la fierté et l’incrédulité d’être élue, la fille "du côté des ploucs" mue pour tenter de se hisser à la hauteur de l’audace irrésistible de son amie. "Ariane osait tout. Moi je n’osais rien, sauf quand elle me regardait." Leur duo - "notre binôme surnaturel" - s’avère vite toxique, pour chacune d’elles comme pour tous les malheureux, filles et garçons, qui croisent leur chemin. Fortifiées par les codes, les serments, le mimétisme qui arment leur relation, elles deviennent d’effrayantes "petites reines de cruauté". "L’unique loisir valable à nos yeux désormais : racoler." Jusqu’à ce que Ariane mette à l’épreuve leur relation. Chantage, jalousie, surenchère sado-maso, manipulations sentimentales…, la journaliste belge Myriam Leroy dépeint sans retenue le monde pervers de ces deux très jeunes filles liées par un amour "dépouillé d’épanchements charnels mais pas moins pulsionnel", leur amitié sans légèreté, exclusive et viciée.

La narratrice qui, comme Myriam Leroy, est née en 1982 confie au milieu du récit, jouant habilement avec le doute sur le caractère autobiographique de cette histoire : "Je me suis longtemps demandé comment la raconter." Passant de la langue crue des adolescentes au ton détaché, sans affects apparents, de la femme adulte, le roman sonne en tout cas terriblement juste. Véronique Rossignol

08.12 2017

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