Quand Mariam vous accueille à la bibliothèque Louise-Michel, dans un quartier populaire du XXe arrondissement de Paris, c’est avec un grand sourire et en vous proposant un verre de thé à la menthe. Depuis l’ouverture de l’établissement en mars 2011, elle occupe le poste de médiatrice familiale, l’un de ces nouveaux métiers que l’on voit fleurir dans les bibliothèques. Blandine Aurenche, la directrice de l’époque, l’avait repérée pour ce rôle non pas en raison de ses connaissances en bibliothèque - Mariam reconnaît qu’elle ne les fréquentait alors que pour y emmener ses enfants -, mais pour des qualités précieuses dont ne dispose pas le reste de l’équipe. Originaire du Mali, elle connaît à peu près tous les habitants du quartier, où elle habite depuis vingt-trois ans, et maîtrise cinq langues africaines : le toucouleur, le peul, le wolof, le bambara et le khassonké. Des atouts qui lui permettent de canaliser les enfants qui viennent souvent seuls à la bibliothèque, de dialoguer avec les parents en cas de problème de comportement, de rassurer les jeunes migrants africains venus consulter Internet et à qui un bibliothécaire a demandé une pièce d’identité pour leur inscription. Et d’être la meilleure ambassadrice de la bibliothèque auprès d’habitants qui n’auraient pas poussé spontanément la porte. "Je vais voir les associations locales, je m’informe sur leurs activités pour les relayer auprès de nos usagers. Je travaille très régulièrement à l’Espace solidarité qui accueille les femmes en difficulté. Je parle des activités de la médiathèque autour de moi, aux associations et aux gens que je connais", explique Mariam. Son thé à la menthe qu’elle prépare pour les lecteurs le samedi et le mercredi est un des moments importants dans la vie de l’établissement. Rapidement, elle est devenue un point de repère pour les usagers les moins familiers avec la bibliothèque, qui ne veulent avoir affaire qu’à elle. "Mariam est un sésame précieux auprès de personnes qui ne seraient pas venues sans elle, confirme en souriant Hélène Certain, l’actuelle directrice de la bibliothèque Louise-Michel. Elle nous aide à décrypter la culture africaine et à ne pas mal interpréter certains comportements. Elle a une approche du public très différente de la nôtre. On apprend beaucoup d’elle." Un beau compliment, amplement justifié, pour Mariam qui doutait d’elle-même lors de ses débuts dans ce poste. "J’avais peur de ne pas être à la hauteur. Mes collègues ont été très patients", confie-t-elle, modeste. Petit détail : Mariam ne lit pas le français, mais cela ne pose pas de problème. "Cela montre bien que la bibliothèque est un endroit où chacun peut trouver sa place", affirme Hélène Certain.

13.06 2014

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