24 août > roman France

Pauline Dubuisson n’est pas une inconnue. L’héroïne bien réelle de Philippe Jaenada a jadis défrayé la chronique après avoir assassiné son amant. Son procès a inspiré Georges Clouzot qui, dans La vérité, lui a donné les traits de Brigitte Bardot, laquelle clamait à l’écran : "Je suis une petite femelle, il faut me laisser faire ce que j’ai envie".

Qui était-elle au fond, Pauline Dubuisson ? Pour Jean Cau dans Paris-Match, elle était une "dure garce". Alphonse Boudard, lui, la voyait comme une "surdouée sauvage". Philippe Jaenada s’est mis à souvent penser à elle. A s’insurger contre ceux qui l’ont, à l’époque, accablée et honnie. Sa version des faits diffère de celles que l’on a déjà pu lire ici ou là - comme récemment dans Je vous écris dans le noir de Jean-Luc Seigle (Flammarion, 2015) dont elle est le cœur.

L’auteur du Chameau sauvage (Julliard, 1997, repris chez J’ai lu) et de La femme et l’ours (Grasset, 2011, repris chez Points) dit de Pauline Dubuisson qu’elle est"déroutante, difficile à cerner". Page à page, il part ici à sa rencontre en essayant d’être "le plus précis, le plus juste, le plus fidèle qu’on puisse être si loin dans son futur". Le lecteur apprend à mieux connaître celle qui a vu le jour le 11 mars 1927 à Malo-les-Bains.

La jeune Pauline lit Nietzsche à l’âge de 11 ans. Elle est témoin du début de la Seconde Guerre mondiale, des bombardements, de l’arrivée des Allemands. A 14 ans, elle couche avec l’aide de camp d’un major, fait ensuite l’objet de plusieurs rapports de police. Contrairement à la société de l’époque, Jaenada ne la juge pas. Il la peint.

Pendant la guerre, Pauline ne mollit pas ni ne refuse ses faveurs. Elle devient la maîtresse du médecin-colonel Werner Domnick, 55 ans, médecin-chef allemand de l’hôpital de Dunkerque. Cela lui vaudra d’être tondue à la Libération.

On suit à la trace cette jeune femme aux yeux en amande, aux cheveux noirs tirant sur le roux. A Lyon, à Lille. Pendant ses études de médecine. Quand elle fait tourner la tête à Félix Bailly ou à Bernard Mougeot. Quand elle a des envies de suicide… A la barre de ce vaisseau littéraire qui fonce à cent à l’heure, il y a un Philippe Jaenada des grands jours. Un écrivain qui s’interroge et donne sa version du dossier. Après l’excellent Sulak (Julliard, 2013, repris chez Points), il est manifeste que le fait divers lui va comme un gant. Al. F.

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