2 novembre > roman Etats-Unis > Matthew Weiner

Certains livres sont comme des reconnaissances de dettes. Le premier roman de Matthew Weiner en est une. Il est assez rassurant en effet qu’à l’heure où la série télé, surtout venue d’outre-Atlantique, exerce son magistère sur la fiction contemporaine, celui qui en est l’un des serviteurs les plus doués, le créateur entre autres de Mad Men et des Soprano, paye ainsi son tribut à la littérature. On ignore si Heather, par-dessus tout (sur le berceau duquel de bonnes fées se sont penchées, A. M. Homes ou la prestigieuse résidence d’écrivains Yaddo) marque pour lui une véritable entrée dans la carrière de romancier ou seulement un pas de côté en attendant de revenir à ses moutons cathodiques. Quoi qu’il en soit, les familiers de ce qui est déjà une œuvre retrouveront tout ce qui fait la force de l’univers de Weiner : la capacité à peindre en quelques traits des personnages dont les forces et faiblesses deviennent familières instantanément au lecteur comme avant au spectateur. Ici, un couple de riches New-Yorkais, névrosés comme il convient, leur trop belle fille, Heather, et un ouvrier du chantier qui fait face à leur appartement, Bobby, un ex-taulard qui ne fixe pas de limites à sa volonté de puissance et de prédation. Weiner amène tout ce petit monde jusqu’aux extrêmes limites de ce que les mensonges contemporains, que sont les rapports de classes, le couple et la parentalité, peuvent supporter. Le désir rôde comme un chien fou. Le mensonge aussi. L’Amérique est un roman noir, une série noire. O. M.

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