Dans la polémique sur la partie de la littérature adolescente qui est mise en question, les édition T. Magnier viennent de publier un livre sur Qui a peur de la littérature ado ? Ce livre arrive à point nommé comme une réponse à la mise en question de certains textes y compris dans le petit monde de la littérature jeunesse. Ce seraient les adultes (parents ou médiateurs) qui auraient peur de la violence contenue dans ces livres plus que les adolescents eux-mêmes. Ceux-ci peuvent surmonter leurs angoisses en leur conférant une fonction de témoignages. Cela aurait une vertu préventive... Il est probable que les jeunes ne soient pas en effet trop traumatisés par ces ouvrages. Surtout, il est encore plus probable que très peu de jeunes les lisent. Dans Lecture-Jeune à paraître, je montre que c'est moins d'un exemplaire sur dix en rayon de Quand les trains passent... (M. Lindroth) et de Je mourrai pas gibier (G. Guéraud) qui est emprunté en bibliothèques. Il n'est donc en effet pas sûr que les jeunes aient peur. Les adultes ont-ils peur alors de ces livres ? De quoi auraient-ils peur ? Ils n'ont pas été interrogé et il est donc difficile de le savoir réellement et donc de leur prêter cette angoisse. Au-delà de leur situation personnelle, ils occupent une position intermédiaire entre leur monde et celui de leurs (grands) enfants. Dans ce rapport intergénérationnel, ils s'interrogent sur les valeurs à transmettre. C'est sans doute dans ce cadre que certains hésitent : comment se réjouir devant la violence gratuite, la domination brutale, la soumission à la drogue, le proxénétisme et autres ? Comment leur contester le droit (si ce n'est le devoir) de critiquer, dénoncer cette mise en cause de valeurs aussi essentielles que le respect d'autrui, l'égalité, le refus de la violence et autres ? Ce n'est pas tant la violence qui choque que sa mise en scène froide et l'absence de réactions. Ils remplissent leur fonction d'adultes dépositaires de valeurs qu'ils voudraient transmettre. Ont-ils peur ? Peut-être. Présenter les adultes comme de pauvres peureux n'est-il pas un peu réducteur ? Insister sur leur « appétit de censure » comme réaction presque enfantine, n'est-ce pas clore le débat : puisque la peur n'est pas digne des parents, leurs réactions face à ces titres de littérature ado sont négligeables donc vive cette littérature ? Puisque la censure est interdite, continuons à éditer des livres... pardon de la littérature ! Il n'est donc pas si mal venu que les parents aient peur... cela fait exister une production éditoriale marginale, délaissée par les jeunes qui préfèrent tellement des univers moins réalistes et pourtant tellement plus proches d'eux...
15.10 2013

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