27 SEPTEMBRE - RÉCITS France

Roger Grenier- Photo CATHERINE HÉLIE/GALLIMARD

En 1992, Roger Grenier consacrait à Tchekhov l'un de ses plus beaux livres (publié chez Gallimard dans la collection "L'un et l'autre"), Regardez la neige qui tombe. Vingt ans après, dans Brefs récits pour une longue histoire, le volume le plus tchékhovien et adamantin de son oeuvre, il met en pratique ce beau programme élégiaque. Chacune des treize très courtes nouvelles qui composent ce recueil ne raconte rien d'autre en somme que l'histoire de messieurs (de dames, moins souvent) qui regardent tomber la neige, passer le temps. Un trio amoureux se forme et se défait du côté de Clermont-Ferrand, une star déchue du cinéma muet se souvient des mois où elle fut dompteuse de tigres, un vieil homme se demande si la maîtresse de ses jeunes années a finalement mis à exécution ses projets de suicide et songe à l'imiter, un violoncelliste, musicien de brasserie, découvre l'amour avec une fille de joie qui n'est que de passage. Cette humanité disparate, rassemblée à l'appel de la littérature, pourrait n'être que cafardeuse. Elle est lumineuse de vie et de mélancolie. Comme dans l'histoire qui clôt le volume et lui donne son titre, love story empêchée et traversant les années et les décennies entre le narrateur (qui ressemble trait pour trait à l'auteur) et une femme qui pense mal et aime bien, Argentine d'origine italienne, rencontrée à Pau et dans l'enfance, égarée à Vienne et jamais tout à fait oubliée à Paris. Roger Grenier nous rappelle l'immense styliste, l'architecte délicat du souvenir, qu'il demeure.

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