2 avril > Essai Italie

Pour le poète italien Filippo Tommaso Marinetti (1876-1944), il ne s’agissait pas d’aller vite, mais toujours plus vite. Et surtout de faire du passé table rase, en allant jusqu’à vouloir brûler les musées et les bibliothèques qui incarnaient à ses yeux la société bourgeoise. C’est le sens du Manifeste du futurisme qu’il publie en français - comme la plupart de ses articles -, à Milan en janvier 1909 et à la une du Figaro le 20 février. Le premier des onze principes donne la teneur du message : "Nous voulons chanter l’amour du danger, l’habitude de l’énergie et de la témérité."

On le retrouve bien évidemment dans cet ensemble impressionnant de plus de 700 textes, manifestes et illustrations réunis par Giovanni Lista, un des meilleurs spécialistes et auteur d’une biographie de Marinetti (Seghers, 1977 et Séguier, 1996). Ce corpus permet de saisir l’ampleur de ce premier mouvement global qui servit de modèle à toutes les avant-gardes du XXe siècle avec un manifeste, un groupe d’artistes et une diffusion internationale.

Bien sûr, il y a des redites dans un tel magma convulsif traversé par un souffle poétique et un ton péremptoire. Mais derrière cette volonté de mettre en place une idéologie du futur, on distingue des dérapages totalitaires. Marinetti rêve d’une "artécratie" - les artistes au pouvoir - mais devient le soutien officiel du régime de Mussolini entre les deux guerres. Et, en 1942, Enrico Mascilli signe un article futuriste et antisémite intitulé "Utilisons les Juifs".

Passé les outrances, ce massif document expose cette tentative de repenser la confrontation de l’homme avec le monde moderne et sa technologie. Au point d’avoir façonné la civilisation littéraire et artistique du XXe siècle ! L. L.

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