Académie Française

"Vous avez senti chez moi une attirance irrésistible pour la langue française, vous m’avez honoré en m’invitant à la soutenir à vos côtés, en sorte que le fauteuil 31, qui comptait déjà deux exclus et un guillotiné, compte aussi, dorénavant, un immigré", a déclaré, jeudi 22 mai dans l'après midi, le Britannique Michael Edwards lors de son discours de réception à l’Académie Française, qui l’avait élu l'an dernier au fauteuil de Jean Dutourd.
 
Faisant selon l'usage l’éloge de ce dernier, qui "chantait inlassablement la gloire de son pays …", le poète, écrivain et professeur britannique a d’abord insisté sur l’admiration de son prédécesseur pour "Oscar Wilde, Sterne, Chesterton, qu’il traduisit, et Stevenson".
 
Cette polarité entre les deux pays, Frédéric Vitoux devait ensuite la souligner davantage encore dans son éloge au nouvel académicien, qu'il fit en réponse :
 
"Une révolution !" s’est-il exclamé en guise d’accueil : "Un Anglais à l’Académie française ! Qui l’eût jamais soupçonné ?"
 
Evoquant tout à tour les Académiciens que furent Colbert, appliqué à "affronter la thalassocratie britannique", le maréchal de Villars "adversaire résolu du duc de Marlborough", Gabriel Hanotaux "qui considérait la Grande-Bretagne comme l’ennemi numéro un de la France", et surtout Voltaire, premier traducteur de Shakespeare, qui ne manquait pas de souligner "le gouffre, l’abîme entre Racine et Shakespeare, entre nos deux pays",  Frédéric Vitoux salue les nombreux travaux de Michael Edwards : "Pour servir l’Entente cordiale, vous avez fait en somme mille fois mieux qu’un tunnel sous la Manche, vous avez creusé (…) un décisif tunnel (…) entre l’auteur de Macbeth et celui de Phèdre, afin de mieux les comprendre en ne cessant de les confronter."
 
Né le 29 avril 1938 à Kingston dans un milieu modeste, Michael Edwards a découvert la langue française à 11 ans, avant de devenir "totalement, rigoureusement et hyperboliquement français".
 
Marié à une française, premier Britannique élu au Collège de France en 2002, il prend la nationalité française en 2003.
 
Fondateur de la revue littéraire Prospice, longtemps collaborateur au Times Literary Supplement, poète, écrivain, professeur, il écrit en français l’essentiel de son œuvre – une vingtaine d'ouvrages – dominée par les mots "langue", "émerveillement", "rire " et "répétition" souligne Frédéric Vitoux.

"Ed est une vieille racine saxonne qui signifie "trésor", précisément, ward, "gardien" et le s final précise "le fils de". : (…) le fils du gardien du trésor. Ce qui est une façon de vous rappeler aussi votre mission parmi nous, avec nous, et dans la filiation de nos prédécesseurs : veiller à préserver et enrichir le trésor de la langue française, cette mission qui nous avait été assignée par le cardinal de Richelieu", insiste Frédéric Vitoux lors d'une ultime analyse étymologique sur le patronyme Edwards.

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