16 août > BD France > Nathalie Ferlut et Tamia Baudoin

Artemisia Gentileschi n’est pas une inconnue du 9e art puisque Chantal Montellier a donné le prénom de cette artiste peintre italienne (1593-1652), influencée par le Caravage, au prix qu’elle a créé pour récompenser des œuvres de bande dessinée réalisées par des femmes. Mais l’Artemisia de Nathalie Ferlut (scénario) et Tamia Baudouin (dessin et couleurs) est l’un des très rares ouvrages et le premier album à être entièrement dédié à celle qui fut en 1616 la première femme admise à la prestigieuses Académie des arts du dessin de Florence. Un geste qui prend tout son sens aujourd’hui, alors que les auteures de bande dessinée s’imposent enfin dans un monde longtemps essentiellement masculin.

Fille aînée d’Orazio Gentileschi (1563-1639), un peintre de la génération du Caravage, qui ne vécut que pour son art et dont la femme mourut jeune, Artemisia se révèle vite sa meilleure élève, bien plus douée que ses frères cadets. Mais à l’orée du XVIIe siècle, les femmes ne sont pas autorisées à accéder au statut de peintre. Leurs sujets sont limités aux portraits et aux natures mortes. Les séances de pose de nus leur sont interdites d’accès. Elles ne peuvent ni signer ni être rémunérées en tant qu’artistes.

Dès son adolescence à Rome, alors qu’elle se forme auprès de son père, puis à Florence, où elle a suivi son mari, Artemisia va devoir mener un double combat pour la reconnaissance de son identité de femme et de peintre. Un événement majeur - son viol répété par Agostino Tassi, un peintre ami de son père, que ce dernier a chargé de lui apprendre l’art du décor -, provoque, jusque devant les tribunaux où son violeur sera condamné, la réunion des deux. Il lui apportera en même temps une involontaire notoriété.

En retraçant la trajectoire d’Artemisia à travers les regards d’une de ses filles et de sa servante, Nathalie Ferlut évite les pièges du didactisme. De son côté, influencée par le Japon où elle réside principalement, Tamia Baudouin, jeune dessinatrice née en 1989, préfère à la ligne claire une forme de "ligne textile", qui contribue à la révélation du personnage et de sa vérité artistique à travers un ballet coloré de tissus dont elle soigne les plis. Fabrice Piault

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