2 mai > Histoire Etats-Unis > Bill Bryson

D’une date, il vous fait une épopée. En restant chez lui, il vous raconte le monde. A partir de presque rien, il vous dit tout ce qu’il sait. Bill Bryson est sans conteste un adepte de la poupée russe en matière d’histoire. Son Eté où tout arriva n’échappe pas à cette règle du tout-en-un. Le point de départ, il en faut bien un tout de même, c’est l’année 1927. Pourquoi? Parce que c’est l’année où Lindbergh traverse l’Atlantique. L’aviateur le plus célèbre de tous les temps survole d’ailleurs ce récit trépidant comme une ombre pas que bienveillante. Pour le reste, ce sont les surprises, les fameuses matriochkas mémorielles du millésime 1927.

En voici quelques-unes: Le chanteur de jazz - avec Al Jolson - inaugure l’ère du cinéma parlant, Babe Ruth révolutionne le base-ball, Henry Ford - dont on ne sait toujours pas s’il fut idiot ou distrait - abandonne son modèle T et promet de ne plus insulter les juifs, la télévision connaît ses premiers balbutiements, et Al Capone ses derniers jours de roi de la pègre. Ce grand réveil de l’Amérique s’accompagne aussi d’une bonne gueule de bois, malgré la Prohibition: Sacco et Vanzetti sont exécutés, un déséquilibré fait sauter une école dans le Michigan et une méprise de la Réserve fédérale précipite le krach de 1929.

De ces Années folles, Bryson exhume des personnages oubliés comme le falot Calvin Coolidge, 30e président des Etats-Unis dont le seul acte notable fut de ne pas se représenter à un deuxième mandat en annonçant de son lieu de vacances: "Je décide de ne pas être candidat." Citons aussi Harold Bell Wright. C’était lui l’écrivain le plus connu de l’époque, bien au-delà de Hemingway, Faulkner ou Fitzgerald. "En 1925, quand la première édition de son roman A son of his father sortit des presses à Chicago, il fallu vingt-sept wagons de marchandises pour transporter tous les exemplaires." C’est le genre d’anecdote qui fait réfléchir sur les notions de célébrité littéraire et de meilleures ventes.

Comme à son habitude, Bryson déroule sa pelote événementielle avec humour, savoir-faire et sens de la formule. "Le plus grand exploit de Charles Lindbergh en 1927 ne fut pas de traverser l’Atlantique en avion, mais de faire construire un avion avec lequel traverser l’Atlantique." Le héros, porté par l’Amérique, après le drame de l’enlèvement et de la mort de son enfant, se consola avec la pensée eugéniste d’Alexis Carrel, fut décoré par Goering en 1938 et tint en 1941 devant Roosevelt un discours antisémite.

La phrase de Fitzgerald laisse un goût amer quand on connaît la suite. "Au printemps 27, une chose brillante, venue d’un autre monde, traversa le ciel comme un éclair." Sans démonstration savante, Bryson montre que les choses, comme les gens, ne sont pas simples. Comme toute enquête sérieuse - l’imposante bibliographie en témoigne -, L’été où tout arriva s’achève sur le devenir des protagonistes. Pour le reste, pas de notes, pas de parenthèses. Juste le plaisir du récit, des faits qui se succèdent, se répondent et s’entrechoquent dans le fracas de l’histoire. L. L.

Les dernières
actualités