7 janvier > roman Etats-Unis

La rentrée étrangère de janvier s’ouvre en fanfare avec la publication d’Aucun homme ni dieu chez Autrement. Parfaitement servi par la traduction de Mathilde Bach, qui a dirigé la collection "Feux croisés" chez Plon, le roman de William Giraldi est un choc.

Les lecteurs français s’apprêtent à prendre de plein fouet une histoire de loups et d’enfants disparus. A se diriger vers un coin reculé de l’Alaska, à la lisière des terres. A découvrir le village de Keelut où il fait froid comme nulle part ailleurs.

A 60 ans, Russell Core n’est pas "le genre d’homme à se laisser facilement effrayer". Ecrivain naturaliste, il s’est notamment fait connaître avec un livre sur les loups. Treize mois plus tôt, sa femme a été clouée par une attaque qui l’a privée de la moitié de son cerveau et de sa lucidité.

Quand il reçoit une lettre de Medora Slone qu’il n’a jamais vue mais qui lui demande son aide, Core décide de se rendre en Alaska où, sa fille - à qui il parle à peine depuis trois ans - enseigne à l’université d’Anchorage. A Keerlut, des loups auraient enlevé des enfants. Dont celui de Medora, garçon âgé de 6 ans. Une Medora dont le mari, Vernon Slone, est absent. Parti combattre sur le front, dans le désert, son quotidien de soldat est fait de cadavres, d’averses de tirs et d’explosions.

William Giraldi abat ses cartes sans effets de manche. L’Américain né dans le Connecticut en 1974 plonge à chaque page le lecteur un peu plus dans la stupeur, tout en provoquant chez lui une sensation d’étourdissement. A mesure qu’il explore le monde qui l’entoure, Cole, lui, pense que la réponse se trouve dans les bois, pas dans les livres. Peut-être parce qu’il ne sait que trop que "les annales de la connaissance humaine sont muettes face à la sauvagerie tapie en chacun de nous". Des surprises, il y en aura ici bon nombre. Autant que des morceaux de bravoures, des scènes d’anthologie, jaillis de la plume d’un écrivain capable de jouer avec le silence et un décor naturel aussi envoûtant que diabolique.

Difficile de ne pas être retourné par les éclairs de violence qui bouleversent le cours d’Aucun homme ni dieu. Quand les protagonistes se retrouvent dans des situations extrêmes, qu’ils font parler la poudre ou manient l’arme blanche pour faire gicler le sang. On pourrait à propos de ce livre superbe évoquer le David Vann de Sukkwan island ou le Marcel Theroux d’Au nord du monde. Mais le geste littéraire de Giraldi est unique. A la fois cru, poétique, dérangeant et maîtrisé. Al. F.

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