7 mars > Essai Italie > Carlo Rovelli

Après le succès de ses Sept brèves leçons de physique (Odile Jacob, 2015), Carlo Rovelli revient sur le sujet qui le taraude le plus, déjà abordé dans Et si le temps n’existait pas ? (Dunod, 2012), et sur la spécialité qui est la sienne, la gravité quantique et la théorie des boucles.

Par bonheur, ce chercheur au Centre de physique théorique de Luminy, à Marseille, explique clairement un univers qui peut déconcerter les esprits cartésiens où ce que l’on constate n’est pas forcément ce qui est. Ainsi, "le temps s’écoule plus vite à la montagne, et plus lentement en plaine". Pas de beaucoup, certes, mais suffisamment pour qu’on le mesure. Cela pose évidemment un problème de taille sur la notion de temps T, celui des équations. Il y a donc un temps pour le montagnard et un autre pour le marin. Pour ce dernier, le ralentissement sera plus net puisque "pour tout ce qui bouge, le temps passe plus lentement". Il n’y a donc pas un temps, mais une multitude.

A l’aide de ces paradoxes déjà envisagés par Einstein mais qui prennent une dimension inattendue avec les hypothèses sur le monde quantique, Carlo Rovelli propose une réflexion stimulante sur cet étrange tic-tac dont les tactiques ne cessent de surprendre. A travers le concept d’entropie, grandeur qui exprime le degré de désordre de la matière, Carlo Rovelli entraîne ses lecteurs dans une vulgarisation qui frôle la métaphysique lorsqu’il explique que "si rien ne change, il n’y a pas de temps".

Si on se place comme il le fait à l’échelle des particules où les notions de passé, de présent et de futur deviennent floues, c’est le ralentissement du temps qui fait tomber les choses. C’est cette même diminution qui nous arrime à la Terre. L’univers depuis le big bang est ainsi envisagé "comme une montagne qui s’écroule petit à petit, comme une structure qui se défait graduellement".

On savait depuis longtemps que la réalité pouvait dépasser la fiction. Mais quand la réalité elle-même devient si spectaculaire, nous abordons des territoires surprenants que Carlo Rovelli nous invite à observer avec beaucoup de prévenance, en n’abandonnant jamais ses lecteurs dans un trou noir d’incompréhension, pour leur révéler un monde d’une extrême beauté, un monde sans temps. Laurent Lemire

16.02 2018

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