Le conseil constitutionnel valide la DADVSI et la rend plus répressive

Le conseil constitutionnel valide la DADVSI et la rend plus répressive

Désordre autour de la loi sur les droits d’auteur après la censure de quatre articles par le conseil constitutionnel.

Par Vincy Thomas
avec vt Créé le 15.04.2015 à 21h52

Saisi par plusieurs députés (PS, PC, Verts et UDF), le Conseil constitutionnel a rendu sa décision sur la loi des Droits d’auteurs et droits voisins dans la société de l’information (DADVSI).

Le conseil a rejeté la plupart des arguments des opposants au gouvernement mais il aussi jugé plusieurs articles inconstitutionnels. D’autres articles ont fait l’objet de réserves d’interprétation.

Des articles mal définis

Le texte validé revient en arrière et durcit la loi votée par le parlement à la fin juin.

Les articles 21, 22 , 23 et 24 ne sont pas valables, souvent à cause de définitions mal rédigées ou contestant le droit d’auteur.

L’article 21 protégeait notamment les échanges dans le cadre d’un travail collaboratif et de recherche. Mais les conditions ont été jugées « imprécises et discriminatoires. »

Les articles 22 et 23 ont aussi été retoqués. Le Conseil n’a pas apprécié que la loi exonère pénalement ceux qui contournaient les verrous de l’interopérabilité. Il s’agissait d’un des rares progrès obtenus au cours de ces derniers mois par les parlementaires. Sa disparition renforce le poids de fabricants ou éditeurs qui refusent au consommateur le droit d’utiliser plusieurs supports pour une même œuvre.

Enfin l’article 24 qui permettait de simples amendes pour les éléments téléchargés, rétablit désormais les peines de prison pour les internautes, en vertu du principe d’égalité. Il n’est pas possible, selon les juges, de faire la différence entre un piratage effectué par courriel, ou un échange entre blog, et celui réalisé à l’aide d’un logiciel P2P.

Des peines plus dures

Clairement ce dernier article n’arrangera pas les affaires du ministre, Renaud Donnadieu de Vabres, qui avait fait une grande partie de sa campagne de communication autour de ces peines mineures et graduées en cas de téléchargements. Là encore le Conseil va plutôt dans le sens des éditeurs.

Pour ne pas être condamné pour contrefaçon, les créateurs de sites, de blogs et de forums, les développeurs de logiciels devront être très vigilants à ce qu’ils diffusent, ce qui remet en cause, fondamentalement, la définition du réseau Internet.

Le consommateur avait gagné quelques avantages avec le passage de la loi par la commission paritaire mixte; au final, ce sont les partisans d’une ligne répressive qui  obtiennent ce qu’ils voulaient : le zéro copie sera ainsi possible et le champ de recherche sera limitée à la cryptographie pour ceux qui veulent déverrouiller les œuvres.

L’association UFC Que Choisir ne s’y est pas trompée en accusant le Conseil d’avoir « censuré les dispositions du texte les moins défavorables aux consommateurs, ce qui aboutit à renforcer la logique inadmissible du « tout répressif » du projet de loi. »

Le ministre, dans un communiqué, « constate avec satisfaction que l’essentiel des dispositions (…) ont été validées. » Il annonce qu’il saisira « le Garde des Sceaux afin que les poursuites soient orientées vers les cas les plus graves. »

La loi serait-elle inapplicable comme le souligne le Parti Socialiste, qui parle de « fiasco législatif majeur » ? Généralement bien accueillie par les sociétés d’auteur, la SACD a cependant déploré « que la censure de la loi sur ce point aboutisse finalement à remettre en vigueur des peines et des procédures délictuelles dont la faible efficacité prouvée ces dernières années ne plaidait pas pour leur maintien. »

Le Conseil constitutionnel n’a pas facilité la tâche du ministre. Et il est fort probable que le débat ne soit pas clôt à quelques mois des élections présidentielles et législatives, quand deux foyers sur cinq sont connectés à Internet.

15.04 2015

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