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L’image du sport et des sportifs est devenue un énorme marché, qui concerne entre autres l’édition de livres. Or, depuis la mi-janvier, le parlement débat d’une proposition de loi visant à instaurer dans le Code du sport un droit à l’image pour les sportifs et les entraîneurs professionnels.

Le texte prévoit l’obligation légale d’une rémunération, laquelle ferait l’objet de négociations contractuelles, en contrepartie de « leur image qui  dépendrait de leur notoriété et de leur attitude ». Il s’agit notamment de prendre en compte les opérations promotionnelles, les campagnes publicitaires, mais aussi les produits dérivés, au rang desquels figurent notamment les ouvrages de librairie.

La redevance ne serait  « ni un salaire ni une rémunération versée en contrepartie ou à l’occasion du travail ». Elle serait indexée sur les recettes générées par l’exploitation commerciale. Son mécanisme précis devra faire l’objet d’un décret.

Rappelons que, à l’heure actuelle, les sportifs bénéficient déjà d’un droit à l’image construit par la jurisprudence. Celle-ci est d’ailleurs assez abondante.

Le cas Cantona

La décision la plus éloquente concerne Eric Cantona et a été rendue le 6 avril 1995 par le Tribunal de grande instance de Nanterre : « Indépendamment de la protection de sa vie privée, tout individu, fût-il célèbre, dispose sur sa propre image, attribut de sa personnalité, d’un droit exclusif, lui permettant d’autoriser ou non sa reproduction, et de s’opposer à ce qu’elle soit diffusée, quel qu’en soit le moyen, sans son autorisation expresse ou tacite ».

Les juges semblent ensuite modérer leur réflexion, avant d’accentuer le principe de la nécessaire autorisation : « toutefois, une personnalité publique consent tacitement, par l’exercice public qu’elle fait de son activité, à ce que des clichés d’elle soient pris dans des lieux publics, plus spécialement à l’occasion de sa profession, et soient publiés, dans des conditions normalement prévisibles, dénuées d’intention malveillante ou plus généralement de faute ; (…) cette présomption d’autorisation cesse cependant dès lors que l’intéresse manifeste explicitement son refus de voir son image diffusée, sous réserve qu’une telle diffusion ne soit pas rendue nécessaire pour les besoins légitimes de l’information due au public ; (…) le caractère gratifiant ou flatteur de la publication faite ou envisagée est sans influence sur les principes ainsi dégagés ».

Ils en concluent qu’ « une telle exploitation à des fins commerciales et publicitaires excède le cadre d’une utilisation normalement prévisible et admissible de l’image publique et du nom d’Eric Cantona, et requérait l’autorisation préalable de ce dernier, alors que non seulement celle-ci n’a pas été sollicitée, mais que bien plus, l’éditeur est passé outre à un refus clairement manifesté et répété avant même la publication ».

Le cas des événements sportifs

Il existe également en droit français, depuis  plus  de deux décennies, un droit, légiféré, au profit des organisateurs d’événements sportifs. C’est la loi du 16 juillet 1984, relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, qui a véritablement entériné, à la suite de la jurisprudence et de la doctrine la plus autorisée, ce qu'il est convenu d'appeler un « droit d'arène ».
        
L'article 18-1 de la loi de 1984 dispose à cet effet : « Le droit d'exploitation d'une manifestation ou d'une compétition sportive appartient à l'organisateur de cet événement ». Le législateur français  consacré ainsi clairement, au profit de tout organisateur d'épreuves sportives, un monopole, lui permettant notamment de délivrer des autorisations de captation et d'exploitation des images captées.
        
Seuls les articles 18-2, 18-3 et 18-4 de cette même loi exposent des règles dérogatoires aux droits de l'organisateur. Ces articles aménagent en effet une sorte de droit de citation des épreuves et ce essentiellement dans un souci d'information ; ce qui ne peut s’appliquer à l’édition de livres et vise les seuls organes de presse écrite, numérique ou ou audiovisuelle.
 
Le collectif
      
Enfin, une loi de 2005  « portant diverses mesures relatives au sport professionnel » comporte un article premier qui encadre encore plus l’utilisation de l’image des sportifs. Cette fois, le texte évoque « l’image collective de l’équipe à laquelle le sportif appartient » et permet aux clubs de l’exploiter plus librement.

En clair, c’est, en dehors même des accords sous seing privé qui sont déjà monnaie courante dans ce milieu pour transmettre son droit à l’image à son sponsor ou à son club, à ce dernier qu’il faut obligatoirement s’adresser. Le nouvel article du Code du sport, encore en discussion, en imposant aux différents opérateurs de rémunérer de façon complémentaire et explicite, fera donc monter les enchères, augmentant incidemment les coûts des éditeurs de livres sur le sport.
 
 
 
 
 

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