Manifestation

Ce week-end, il n’y avait pas que devant l’Ambassade de Russie que l’on faisait la queue. Rue Bonaparte également, devant la Mairie du 6e arrondissement, où se tenait la troisième édition du Salon du livre africain de Paris. Erick Monjour, président de l’association qui le porte, en dresse le bilan, très positif. « Nous avons enregistré cette année une fréquentation en forte hausse, avec plus de 8 000 visiteurs, essentiellement des Africains sub-sahariens de la diaspora, mais aussi des Maghrébins. Les éditeurs présents, plus de 80, dont certains représentés par des libraires, ont très bien vendu, plus que dans un salon "classique". Les auteurs, plus de 200, ont pu dialoguer avec leur public, dédicacer leurs livres, et les rencontres ont fait le plein. On a dû rajouter des tables, et refuser vingt éditeurs, essentiellement français ». Parmi les maisons d’édition présentes, dont sept du Maghreb, deux par pays d’Afrique (avec la Côte d’Ivoire comme invitée d’honneur cette année), un du Brésil, un de Guyane, on a remarqué L’Atelier des nomades, de l’Ile Maurice, qui présentait un Manifeste pour la lecture, sous-titré « Les auteurs francophones célèbrent le livre ».

Seize écrivains se sont prêtés à une apologie personnelle de la lecture, du livre, de la littérature, menés par Ananda Devi, avec notamment Kenza Sefrioui, Johary Ravaloson ou Véronique Massenot. Coup de chapeau également aux Lettres mouchetées, la petite maison créée il y a huit ans à Pointe Noire, en République du Congo, par Muriel Troadec, rejointe en 2022 par Marie Sambay, établie, elle, sur l’autre rive du fleuve Congo, à Kinshasa, République démocratique du Congo. Un de ses auteurs, Dibakana Mankessi, a vu son roman, Le psychanalyste de Brazzaville, récompensé par le Grand prix d’Afrique 2023 des écrivains de langue française. Présent lors de sa remise, l’écrivain a reçu une véritable standing ovation. L’éditrice elle-même a été saluée pour son travail.

Un écosystème fragile

Mais, via Livres Hebdo, elle lance un véritable SOS : « Nous sommes une petite maison d’édition indépendante. Les auteurs sont vraiment impliqués dans son existence. Les manuscrits affluent, mais nous ne recevons pour l’instant aucune aide, ni des Etats africains, ni de la francophonie, ni du CNL. Devant l’augmentation de toutes les charges, notre activité même est menacée ».

L’autre récompense littéraire décernée au salon, le Prix Beaux Livres de la Maison de l’Afrique 2024, est allée à Textiles africains, un ouvrage en anglais de Duncan Clarke, Vanessa Drake Moraga et Sarah Fee, traduit et publié chez Citadelles et Mazenod, en septembre 2022. Erik Monjour insiste sur le rôle de sa manifestation pour « créer des ponts entre les différents salons du livre, nombreux en Afrique, ainsi que des salons européens qui s’intéressent à l’Afrique : Paris, Genève, Berlin, Madrid… ».

Besoin d'espace 

Le Salon du livre africain de Paris est partenaire des 72 heures de Conakry, qui se tiendront dans la capitale guinéenne les 23-24-25 avril prochains, puis du SILA d’Abidjan, du 14 au 18 mai, dans le cadre du programme Accès Culture mis en place par l’Institut français et L’agence française pour le développement. C’est au SILA que sera voté et décerné le prix Orange du livre en Afrique 2024, dont la sélection finale vient d’être dévoilée. Quant à l’avenir, le président Monjour est bien conscient que la formule actuelle arrive à saturation : « Soit nous trouvons un lieu avec des salles plus importantes, soit, pour rester dans le quartier, nous envisageons de mettre des tentes sur la place Saint-Sulpice, comme cela se fait souvent. Mais c’est une question de budget et de logistique », conclut-il. Le tout au service d’un but commun : le livre, dans sa dimension la plus universelle. « J’écris, je lis, je dessine / Pour lire le monde », écrit la Franco-ivoirienne Véronique Tadjo

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