9 octobre > essai France

On se souvient de Ma ligne 13 (Le Rocher, 2003) de Pierre-Louis Basse ou de Voyage en grande bourgeoisie des Pinçon-Charlot (Puf, 1998). Nicolas Jounin a opté pour une forme intermédiaire, entre le témoignage et l’investigation. Le sociologue a demandé à ses étudiants de l’université de Paris-8 Saint-Denis d’aller examiner les beaux quartiers parisiens. De 2011 à 2013, trois promotions de première année ont donc investi les zones huppées des Champs-Elysées, de Monceau et de la Madeleine.

D’habitude, ce sont des chercheurs confirmés qui étudient les riches pour limiter les situations de dépendance lors des entretiens. Dans le cas présent, une demi-heure de transport suffit à mettre en évidence la distance sociale qui sépare les quartiers les plus pauvres du triangle d’or où s’imposent les palaces et les boutiques de luxe. Les étudiants sont mal à l’aise, le plus souvent. "Nous sommes pris dans les limites de notre corps socialisé", constate Nicolas Jounin. Ils ne sont pas non plus toujours les bienvenus dans ce havre de la profusion, d’autant qu’une des étudiantes est voilée.

Ces trois enquêtes imbriquées se lisent comme un reportage. Nicolas Jounin nous immerge avec ses apprentis sociologues dans le monde de l’opulence. Il montre aussi les moyens de dépasser l’exotisme et le manichéisme pour entrer dans la compréhension. Chacun part sur des a priori, puis il affine. Nicolas Jounin n’est pas un pédagogue sadique. Il expose la méthode sociologique pour explorer ce gouffre social et explique à ces jeunes du 93 qu’il existe un outil pour réduire cette faille. Cela s’appelle l’université… L. L.

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