6 mai > roman Cuba

Il y a, dans la prose de Leonardo Padura, comme une douce musique qui nous emporte dans un tourbillon d’émotions. Bercé par son île natale, Cuba, l’écrivain la restitue à travers les cinq sens. Les brumes du passé, L’homme qui aimait les chiens ou Hérétiques l’ont imposé sur la scène internationale. Autre succès : la série policière Les quatre saisons suit les mésaventures du héros Mario Conde. L’enquêteur revient d’ailleurs dans la collection poche "Suites" chez Métailié et dans une version télévisée.

Ce qui désirait arriver rassemble des nouvelles si belles qu’on peine à les quitter. Les réminiscences du passé s’infiltrent dans le présent, à l’heure où les personnages de Leonardo Padura font un bilan mitigé de leur existence. Portés par une écriture suave, sauvage et lyrique, ils évoluent entre des sentiments dichotomiques. Chaque histoire est comme un bijou sorti du néant, serti par une lumière particulière. "Il faut accepter que rien n’est vérité, écrit l’écrivain cubain. La réalité, c’est naître et mourir." Vivre et renaître aussi, mais la fatalité se fraye souvent un chemin dans le cœur des hommes. Elle brise l’élan des amants, en introduisant les imprévus de l’Histoire, ou sème le doute auprès des âmes délaissées.

La solitude unit ces protagonistes si humains, qui affrontent le chagrin, l’amour ou la joie. Un pas-de-deux avec l’autre ou soi. Le temps a beau passer, il n’a aucune prise sur certains êtres rencontrés, même furtivement. Une passion brûlante entre un étudiant et une merveilleuse chanteuse, une nuit torride au goût d’interdit ou un homme tiraillé entre deux bien-aimées ponctuent ces moments où la quiétude se dérobe à notre insu. C’est là que les larmes, la poésie ou l’extase se libèrent. Sensuelles, tristes ou énigmatiques, les femmes laissent une empreinte indélébile.

Les rendez-vous manqués ou les rêves fracassés ont un air de nostalgie. Chez Leonardo Padura, elle prend cependant une teinte rosée. Quelle est notre part de responsabilité dans nos destinées ? Avant de rencontrer l’ange de la mort, Alborada s’offre une bouffée de plaisir. "Les petits gâteaux à la goyave, le lait condensé ou le savon Palmolive" la ravivent encore une fois. Comme pour célébrer l’esprit, l’odeur et les saveurs de Cuba. Un pays inspirant, indéniablement rythmé par "cet univers de rhum, de pénombre, de cigarettes, de petits matins sans sommeil et de lascivité". Kerenn Elkaïm

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