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Synthia Sully (ABF Antilles-Guyane) : "En Guyane, on a tout à construire"

Synthia Sully, présidente de l’Association des Bibliothécaires et Documentalistes de Guyane (ABDG), vice-présidente de l'ABF Antilles-Guyane et cheffe de projet de la future médiathèque de Soula, à Macouria (Guyane). - Photo Synthia Sully

Synthia Sully (ABF Antilles-Guyane) : "En Guyane, on a tout à construire"

Entre besoin de formation, nouveaux équipements et rôle de service public, tour d'horizon de la situation de la lecture en Guyane avec Synthia Sully, présidente de l’Association des bibliothécaires et documentalistes de Guyane (ABDG), vice-présidente de l'ABF Antilles-Guyane et cheffe de projet de la future médiathèque de Soula, à Macouria. 

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Par Fanny Guyomard
Créé le 16.12.2022 à 17h42

Livres Hebdo : Comment décririez-vous le paysage de la lecture guyanais actuel ?

Synthia Sully : Il est plutôt prometteur. On a passé une période de dix voire vingt ans un peu difficile, où les politiques ne s’intéressaient pas à la lecture publique. Mais le nouveau Conseiller livre et lecture, Abdoulaye Keita, a pris son bâton de pèlerin pour sensibiliser les maires à l’intérêt d’avoir des médiathèques. Depuis trois, quatre ans, des projets émergent dans différentes communes.

 

Lesquels ?

La ville enclavée de Papaichton, difficilement accessible par la route, travaille sur une maison imprégnée de la culture locale, avec une médiathèque et des salles de danse ou de musique. Un projet est aussi à l’étude à Grand Santi, ainsi que des bibliothèques de quartier à Saint-Laurent, la ville la plus peuplée de l’ouest guyanais. Montsinéry-Tonnegrande a elle sa bibliothèque depuis l’été dernier.

Mais le problème, c’est que l’on manque de ressources humaines. Nous sommes peu nombreux à être en capacité de piloter de gros projets.

 

En raison d’une offre de formation insuffisante ?

Oui, clairement. Mais ça bouge : l’Enssib propose des formations à distance, on va peut-être travailler avec le réseau Canopé et l’antenne Antilles-Guyane de l’Association des Bibliothécaires de France (ABF) a remis en place une formation d’auxiliaires de bibliothèque. Mais ce n’est pas encore suffisant. Et quand on a du personnel qualifié, il ne reste pas longtemps sur le territoire.

 

Pourquoi ?

Peut-être à cause d’une certaine usure, faute d’accompagnement et de soutien des élus, mais aussi parce que le territoire est complexe et manque souvent d’attractivité. Et puis parce que la mobilité professionnelle est importante pour la carrière.
 

Le réseau des librairies se développe-t-il en parallèle ?

Deux ou trois librairies ont émergé ces dernières années, mais elles restent concentrées du côté de Cayenne…

 

Une caractéristique de votre territoire : la jeunesse de sa population. Qu’est-ce que cela implique pour les bibliothèques ?

60% de la population a moins de 18 ans. Donc on la met au centre de nos espaces, nos collections et nos animations. Si on a une enveloppe de 5000€, on met les trois quarts sur la jeunesse !

 

Un autre chantier : les travaux de votre nouvelle médiathèque devraient commencer en 2023. Comment le projet a-t-il été initié ?

La ville de Macouria avait au départ prévu de créer une maison France services (qui accompagne les habitants dans leurs démarches administratives et sociales) dans un quartier prioritaire appelé Soula, à une dizaine de kilomètres du centre-bourg. Le Conseiller livre et lecture lui a parlé des possibilités de financement par le ministère de la Culture, et l’idée a alors été de créer une médiathèque-pôle de services. On a prévu des espaces communs.

 

Comment éviter d’être un fourre-tout ?

Est-ce problématique d’être fourre-tout ? Les médiathèques ont vocation à proposer un tas de services. La Guyane manque tellement de services que si la médiathèque peut apporter un début de réponse aux demandes administratives et sociales des habitants, c’est gagné.

 

Quelle place pour le livre dans ce futur lieu hybride ?

La médiathèque reste le cœur de l’équipement. On a vocation à faire vivre le livre, à le désacraliser, a en faire un objet banal comme un téléphone ou une fourchette, faire comprendre qu’on peut l’emprunter, s’amuser avec, y voyager. Le livre n'est pas la seule réponse à l’émancipation de l’individu, mais c'est l'objet prioritaire.

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