2 mai > Premier roman France > Vincent Ollivier

Ce sont d’abord trois coups de feu dans la chaleur d’un été toscan. Des hommes, des femmes, des familles, viennent dans une vaste maison d’hôtes dédiée à l’amour des chevaux et des activités équestres pour communier ensemble dans la satisfaction tacite de faire partie des heureux du monde. Les détonations, déchirant la suavité du réel, viennent y mettre fin. Elles proviennent de la chambre de Linda, James et Brian, une famille anglaise (mère, père et fils) que rien a priori ne distingue des autres pensionnaires. Trois coups de feu, trois morts et le rideau déchiré qui s’ouvre sur un paysage de désastre où le mensonge, le désir et la cupidité mènent la danse. Il faudra comprendre la fine correspondance qui relie les estivants à deux militaires américains engagés sur le théâtre des opérations en Afghanistan. Trafic d’armes, adultère, circuits financiers parallèles… Qu’est-ce-que les riches ont de plus que nous, demandait Fitzgerald. De l’argent, lui répondait Hemingway. En Toscane, la comédie des apparences est aussi une tragédie, et réussir sa vie, ce peut être aussi soigner sa sortie de scène.

Trois coups de feu aussi comme les trois coups qui précèdent le lever de rideau. Cette fois-ci, ils nous annoncent, sans crainte aucune de se tromper, la naissance d’un écrivain. Toscane est le premier roman de l’avocat parisien Vincent Ollivier dont quelques fugaces prestations sur les plateaux de télévision (notamment lorsqu’il fut amené, les jours qui suivirent l’attentat contre Charlie Hebdo, à évoquer son ex-client Chérif Kouachi…) avaient laissé apprécier son éloquence et sa maîtrise rhétorique. Il est moins question de cela dans ces pages joliment engourdies d’élégance, de finesse d’analyse et de discrète jubilation romanesque. Ollivier s’y entend si bien en matière d’ambiance et de secrets, comme autant de complots de colère, que sa Toscane est très proche des paysages aussi faussement idylliques du cycle des Ripley de la grande Patricia Highsmith. Les amateurs apprécieront. En tout cas, rien ici de très français, car au noir on préfère les plus profonds et indécis camaïeux, un "understatement" plutôt britannique qui dévoile peu à peu des gouffres où vient s’abîmer la raison des personnages et s’abandonner le lecteur. Olivier Mony

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