19 avril > Autobiographie Grande-Bretagne > Lesley Blanch

Peu connue en France, où elle vécut pourtant, dans le Midi, de 1946 à sa mort, en 2007, à l’âge de 103 ans, Lesley Blanch était quelqu’un de tout à fait exceptionnel. Une grande dame, qui se revendiquait avant tout voyageuse, et afficha, jusqu’à la fin, son sacré caractère. Elle avait une mémoire intacte, la dent dure, et une plume superbe, même si elle n’écrivait plus guère. Aussi, l’idée que, grâce à sa filleule Georgia de Chamberet, elle compose ses Mémoires, au début des années 2000, ne pouvait que séduire. L’entreprise s’est hélas interrompue en 2004, Lesley ayant été gravement choquée par la publication, cette année-là, de la biographie, par Myriam Anissimov, de Romain Gary, le caméléon (Denoël, 2004), dont elle avait été la femme de 1945 à 1963, puis était demeurée proche jusqu’à son suicide, fin 1980. La biographe n’était guère tendre avec l’ancienne épouse. Lesley Blanch avait aussi vécu un autre drame, en 1994. Sa maison de Garavan, près de Menton, une espèce de caravansérail à la Loti, emplie de ses souvenirs, objets, livres, archives, manuscrits, avait brûlé. Elle y avait presque tout perdu, décidant courageusement de demeurer sur place, mais traumatisée à jamais.

Le livre qui paraît aujourd’hui en français est donc composite. Il mêle les souvenirs rédigés par Lesley sur ses années de jeunesse, un choix de ses principaux articles (notamment ceux qu’elle a donnés à Vogue, de 1935 à 1945), et reprend également le petit essai Romain, un regard particulier qu’elle avait publié en 1998, chez Actes Sud, à l’attention du public français, traduit par Jean Lambert. "Un regard intime", dit-elle, sur cet "homme hors du commun" qui dégageait "un charme animal", qu’elle a accompagné dans son parcours et ses postes diplomatiques, jusqu’à ce que la vie avec ce mythomane, mystificateur, égoïste, hypocondriaque et infidèle, devienne impossible. Elle ne devait pas être commode non plus. Après leur divorce, ce ne fut plus qu’une "amitié téléphonique". C’est sa version, bien sûr, de l’histoire, mais elle est passionnante. On y retrouve parfaitement Lesley Blanch, son humour à froid, sa lucidité, sa liberté absolue. Et son style, surtout. J.-C. P.

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