Jean-Marc Roberts est mort

Jean-Marc Roberts en 2011 © O.Dion

Jean-Marc Roberts est mort

L'écrivain et éditeur, patron de Stock, est décédé lundi 25 mars en fin de matinée des suites d'un cancer.

Par Christine Ferrand
avec cf Créé le 15.04.2015 à 22h43

Disparu à 58 ans, lundi 25 mars en fin de matinée des suites d'un cancer, le directeur général de Stock Jean-Marc Roberts venait de publier son 22e roman Deux vies valent mieux qu'une (Flammarion) dans lequel il tisse habilement le quotidien de la maladie qui s'était déclarée à l'été 2011 avec ses souvenirs d'adolescence en Toscane. Un livre à la fois léger, souvent drôle, et grave, maîtrisé jusque dans la nonchalance. (1)

Ecrivain réputé, surtout depuis le prix Renaudot attribué en 1979 à Affaires étrangères porté à l'écran par Pierre Granier Deferre en 1981 sous le titre Une étrange affaire, puisant toujours ses sujets dans sa vie pour en faire une sorte d'autofiction à sa façon, avec pirouettes et chausse-trappes, Jean-Marc Roberts a été également un grand éditeur, aimant notamment soutenir des textes d'autofiction, au risque du scandale, comme l'oeuvre de Christine Angot.

Tout récemment, il était remonté au créneau, trouvant la force de répondre à quelques interviews pour voler au secours de Marcela Iacub et de son livre Belle et Bête, qu'il avait publié chez Stock et qui, mettant en scène une supposée liaison avec Dominique Strauss-Kahn, a défrayé la chronique pendant plusieurs semaines.

Cela lui avait permis de définir une nouvelle fois sa conception du métier d'éditeur. A la question de Sylvain Bourmeau, pour «Le Mag» de Libération le 9 mars dernier, «C'est quoi votre catalogue?», il avait répondu: «Un goût. Parfois un bon goût, parfois un mauvais goût. Un goût, c'est ce qu'il y a de plus difficile à avoir. J'en connais tant qui n'en ont aucun. Qui demandent leur avis à tout le monde avant de publier un livre. Comme si, amoureux d'une fille, tu demandais leur avis à dix personnes».

Jean-Marc Roberts a commencé sa carrière d'éditeur en 1973, chez Julliard, presqu'en même temps que sa carrière d'écrivain, puisque son premier roman, Samedi, dimanche et fêtes a été publié au Seuil en 1973 également. Il a ensuite été éditeur au Seuil où, au cours des seize années qu'il y a passé, il s'est fait une solide réputation de «faiseur de prix».

Après un court passage chez Grasset, puis au Mercure de France, il est appelé par Claude Durand, P-DG de Fayard, pour y développer un département de littérature française. En 1998, il prend la direction de Stock, où il transporte sa collection et la célèbre couverture bleue qui signe depuis les romans français de la maison.

Au cours de ses quarante ans d'édition, Jean-Marc Roberts a imprimé sa marque personnelle dans un grand amour de la littérature et des écrivains, prêt à tout pour valoriser ses auteurs, revendiquant toujours sa liberté.

Parti sur un ultime combat et un dernier livre, quintessence de son talent, Jean-Marc Roberts laisse l'image du «grand éditeur à la française», proche de ses auteurs et professionnel avisé, grand séducteur devant l'éternel.

Dans leur communiqué, Stock et sa maison mère, Hachette Livre soulignent: «Il nous a quitté comme il a vécu, avec lucidité et panache, en auteur et éditeur de grand talent.»

La ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, qui a publié deux ouvrages chez Stock, a rendu un hommage ému à son éditeur :« Je voudrais dire mon éternelle gratitude pour celui qui m'a entourée de ses conseils avisés et de ses encouragements incessants, pour me donner la force et la confiance d'écrire, celui qui, depuis dix ans maintenant, était devenu mon ami, a-t-elle souligné. Je voudrais rendre hommage à cet homme qui aimait si passionnément les livres qu'il consacrait autant d'énergie et de talent à les écrire et à les éditer et servait avec la même passion les livres des autres et les siens. S'il était un éditeur remarquable, fidèle, attentif, généreux, toujours si disponible, c'est parce qu'il était lui-même un très grand écrivain. »

(1) Voir notre article dans Livres Hebdo n°943, du 1.3.2013, p. 61.

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