Procès

"L'insurrection qui vient" n'est pas un livre terroriste

Eric Hazan - Photo Olivier Dion

"L'insurrection qui vient" n'est pas un livre terroriste

Le livre publié en 2007 par La Fabrique était une des pièces à conviction de l'accusation de terrorisme contre le "groupe de Tarnac", rejetée par la Cour de cassation.

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Par Hervé Hugueny
Créé le 11.01.2017 à 18h33

Dans un arrêt rendu le 10 janvier, la Cour de cassation a jugé que les huit accusés englobés sous l'appellation de "groupe de Tarnac" ne pouvaient être poursuivis pour terrorisme. Parmi les pièces à conviction à l'appui de cette qualification, les enquêteurs et le procureur de la République de Paris avaient notamment retenu L'insurrection qui vient, ouvrage signé d'un mystérieux "Comité invisible" et publié en 2007 par La Fabrique, dont quelques exemplaires avaient été trouvés en possession de deux des accusés.
 
En raison d'un bref passage évoquant la désorganisation des moyens de communication, les enquêteurs voulaient en faire un manuel de guérilla qui aurait inspiré la mise hors service de caténaires de TGV commise en 2008, principal délit reproché aux accusés. L'accusation avait aussi tenté sans succès de démontrer que Julien Coupat, présenté comme le leader du groupe, était l'auteur de ce manifeste.
 
Instrumentalisation?

Eric Hazan, responsable des éditions La Fabrique, avait été convoqué par la sous-direction antiterroriste chargée de l'enquête et entendu pendant plusieurs heures, pour lui faire dire qui étaient le ou les auteurs de l'ouvrage, ce qu'il s'est refusé à faire. Toujours avec l'objectif d'en savoir plus sur ce livre, le parloir de la prison où Julien Coupat était détenu pendant six mois avait été placé sur écoute, sans plus de succès. Les enquêteurs avaient même interrogé la baby sitter autrichienne de Julien Coupat, puis s'étaient rabattus sur la retranscription de propos dans les médias d'Eric Hazan et de Gérard Coupat, père de Julien.
 
Me William Bourdon, un des avocats de Julien Coupat, avait dénoncé l'instrumentalisation d'un livre, qui ne faisait en tant que tel l'objet d'aucune poursuite, alors que la logique de l'accusation aurait pu laisser supposer qu'il soit aussi attaqué pour apologie du terrorisme.

Best-seller
 
Si l'ordonnance de renvoi rendue en août 2015 retenait l'accusation de sabotage, la juge d'instruction chargée du dossier avait en revanche estimé que la qualification de terrorisme ne pouvait être retenue. Le parquet et la SNCF avaient fait appel, mais la Cour avait confirmé la décision en juin 2016: "quels que soient le contenu et les termes de l'ouvrage L'insurrection qui vient, il ne résulte pas des éléments versés au dossier d'information la démonstration d'une intention terroriste au travers des faits réellement commis" note l'arrêt d'appel attaqué en cassation par la SNCF et le procureur général, dont les pourvois ont été rejetés.
 
Publié dans une relative indifférence, L'insurrection qui vient est devenu le best-seller de La Fabrique grâce à cette publicité inattendue. Bien qu'il soit très largement piraté, ses ventes approchent maintenant des 53000 exemplaires selon GFK, et il s'en écoule quelques dizaines d'exemplaires chaque semaine. A la veille de Noël, les ventes ont même quadruplé par rapport à la moyenne hebdomadaire habituelle. Le Comité invisible a publié A nos amis en octobre 2014 (26400 ventes) et un troisième titre est annoncé pour le 24 janvier (Maintenant, 70 pages, 8 euros). Lors d'une interview sur France Inter en 2015, Julien Coupat a indiqué qu'il se considérait maintenant plutôt comme bibliothécaire, sans plus de précision.

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