Québec

Après huit mois de travail, le 19 mars dernier, la Commission d'examen sur la fiscalité québécoise a rendu public son rapport sur la révision de l'aide fiscale apportée aux entreprises culturelles. Dans ce texte, la Commission a recommandé l'abolition de la détaxation des livres de la TVQ (taxe de vente du Québec, ou TVA québécoise), les sommes dégagées devant plutôt être réallouées à l'industrie du livre et à sa promotion. Jusqu'à présent, la vente des livres, imprimés ou numériques, est détaxée dans le régime de la TVQ, dès lors qu'ils possèdent un numéro ISBN. En revanche, le consommateur paye la TPS (TVA canadienne, 5%) sur chaque livre acheté.

"La commission recommande d'abolir la détaxation des livres de la TVQ. La détaxation des livres de la TVQ a été mise en place afin de favoriser l'industrie du livre qui est au cœur de la spécificité québécoise, et afin de maintenir l'accessibilité de ce produit culturel. Pour la commission, la détaxation n'est pas le meilleur moyen d'atteindre ces objectifs. La commission considère qu'il serait plus approprié de taxer les livres et de réallouer les sommes dégagées à l'industrie du livre et à sa promotion", explique-t-elle dans son rapport. 

Le président de la Commission, Luc Godbout, explique dans un entretien à Radio-Canada, qu'"En détaxant le livre, on détaxe le livre de recettes américain, on détaxe le roman français, on détaxe tout. On ne détaxe pas seulement le livre québécois. Nous, on dit : "Taxez le livre, prenez cet argent et aidez l'industrie du livre et sa promotion." Ça va être beaucoup plus efficace pour l'industrie du livre québécois."

Un recul historique

Le mouvement "Sauvons les livres" a réagi dans un communiqué daté du 20 mars, s'opposant catégoriquement à cette proposition. "Lever l'exemption dont bénéficie le livre serait un recul historique pour le milieu du livre et pour les lecteurs québécois", soutient la porte-parole du mouvement, Élodie Comtois. "Le livre n'est pas un produit de consommation comme les autres et il doit continuer de jouir d'un régime fiscal particulier compte tenu de son rôle de diffuseur de la culture et du savoir. Rappelons-le, taxer les livres, c'est imposer l'ignorance", poursuit-elle.

L'inquiétude est d'autant plus grande que le ministre des Finances, Carlo Leito, confirmait que certaines des mesures proposées dans le rapport se retrouveraient dans le prochain budget de la Province. Le gouvernement de Philippe Couillard avait déjà écarté le projet de son prédecesseur sur la réglementation du prix du livre et n'a toujours pas rendu public un plan de soutien aux librairies indépendantes, pourtant promis pour le début de l'année.

Pour "Sauvons les livres", "Le Québec ne doit pas devenir la première province canadienne à briser le régime d'exception dont profite le livre. Nulle part au Canada la taxe de vente provinciale ou la portion provinciale de la TVH [taxe de vente harmonisée qui combine en un seul taux la taxe provinciale et la taxe fédérale, ndlr] n'est imposée aux livres. Ce serait pour le Québec, aux prises avec un taux alarmant d'analphabétisme, une bien triste façon de s'illustrer comme société distincte. Il existe aussi un quasi-consensus à ce sujet au sein des pays industrialisés puisque 30 des 34 pays membres de l'OCDE ont un régime particulier pour le livre et ont fait le choix de favoriser un meilleur accès au livre."

Dans un contexte difficile pour le marché du livre québécois, avec des ventes en baisse de 9% l'an dernier, cette nouvelle taxe provoquerait une augmentation de plus de 10% sur le prix du livre. 

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