En décembre dernier, l'auteure de science-fiction Ursula K. Le Guin quittait avec fracas la Guilde des auteurs américains, dont elle était membre depuis quarante ans, pour protester contre la signature deux mois plus tôt d'un accord liant l'institution et la société Google. « Vous avez décidé de faire commerce avec le diable », écrivait-elle dans sa lettre de démission, « et vous avez présenté vos arguments. J'aimerais pouvoir les accepter. Cela m'est impossible. »

Alors que les écrivains américains ont jusqu'au 28 janvier pour soustraire leurs oeuvres de Google Book, Ursula K. Le Guin a lancé une pétition réunissant les signatures de plus de 300 écrivains. Les signataires demandent que les Etats-Unis « ne soient plus soumis à l'accord » et que « le principe du copyright, directement menacé par l'accord, soit honoré et maintenu aux Etats-Unis ».

Le dilemme auquel sont confrontés les auteurs américains reste difficile à trancher, comme en témoigne l'attitude de la romancière pakistanaise Kamila Shamsie. Celle-ci figure parmi les signataires de la pétition, mais elle a pourtant décidé d'accepter l'accord Google. Elle explique: « Le choix se ramène à ceci : préférez-vous légitimer l'accord Google en l'acceptant afin d'avoir un plus grand contrôle sur votre oeuvre, ou bien le refuser... et vous accrocher à vos droits... même si cela implique une diminution considérable de votre contrôle sur ce qu'il advient de vos livres ?»

Les descendants de John Steinbeck et de Woody Guthrie ont probablement fait le même calcul : initialement opposés au plan Google, ils viennent de négocier un accord avec l'entreprise. « Bien que nous demeurions convaincus que ce qu'a fait Google constitue une infraction au copyright, il est temps de quitter le champ de bataille et d'évaluer nos pertes et nos gains », a annoncé la famille Steinbeck.