24 janvier > BD France > Prosperi Buri

Originaire de l’île de Groix (Morbihan), Prosperi Buri, de son vrai nom Renaud de Chateaubourg, a plusieurs fois croqué son île et les Groisillons dans des nouvelles et courts récits dont certains sont parus dans la revue Lapin, à L’Association. En les rassemblant dans Insulaires, qui comprend aussi La montgolfière, une fiction parue dès 2007 chez Warum, le graphiste indé, cofondateur par ailleurs du groupe de rock The Dirty Cousins’ GroiXplosion, compose un passionnant portrait de groupe.

L’introduction de l’ouvrage, inspirée de l’émission de FR3 "En flânant…", réalisée par Roger Gicquel en 1994 à Groix, règle son compte à toute approche folklorique de l’île. Si Prosperi Buri s’intéresse aux contes et légendes du rocher breton, ce n’est pas pour céder au pittoresque, mais pour mettre au jour, avec un humour grinçant administré à froid, l’histoire d’un milieu et un mode de vie. Sa nouvelle la plus fascinante restitue la légende de la Korrigez, une sirène mangeuse d’enfants, en la dépouillant de sa dimension fantastique pour la montrer comme un système organisé d’élimination des nourrissons non désirés. Selon lui, au prétexte de ramasser des "treumouchs", des coquillages succulents mais bien accrochés à leur rocher, les jeunes filles (souvent des filles mères) déposaient leur couffin un peu trop près des vagues…

Le "Journal du Docteur Galleux", inspiré de la correspondance de deux médecins à propos de l’épidémie de dysenterie putride qu’a connue l’île en 1777-1779, montre comment la Compagnie des Indes a empoisonné l’eau bue par les Groisillons en organisant aux abords et sur l’île la mise en quarantaine des marins de retour des Indes, et en y inhumant sans discernement les victimes de la dysenterie. Prosperi Buri évoque dans de multiples petites saynètes les autres fléaux qui ont affecté les habitants de l’île : alcool, suicide, disparitions en mer ou simplement… rumeur. Il décrit les récits et légendes qui tournent autour du "trou du Diable", devenu l’une des attractions touristiques de l’île, l’activité des naufrageurs ou le traitement réservé aux envahisseurs de tout poil : fort peu enviable ! Fabrice Piault

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