"Il faut vouloir faire l’amour à la vie." Telle est la philosophie de Frances, une jeune Américaine évoluant dans un univers étriqué. Alors que son copain l’a délaissée, elle éprouve le besoin de s’éloigner des siens. Elle rêve de "cours pour apprendre soit à créer de la lumière, soit à la conserver". Une idée dénuée de sens, si ce n’est qu’elle va la concrétiser. Pragmatique, son père est sceptique. "Qu’est-ce que ça apporte de faire ce qu’on aime, si ce qu’on aime n’apporte rien au monde ?" Une question souvent posée aux artistes ou aux penseurs.
Rebecca Dinerstein a juste suivi sa voie. Cette New-Yorkaise, née en 1988, effectue des études littéraires. Son mentor à Yale ? Jonathan Safran Foer qui l’encourage à déployer son imagination. Désireuse de changer d’horizon, elle pose ses valises dans un archipel norvégien. Une expérience exquise lui inspirant un recueil de poésie bilingue et un premier roman, situé près du cercle polaire. C’est donc là que débarque Frances pour chercher la lumière. Dans ce désert blanc, le soleil ne se couche jamais. "Peut-être pouvais-je apprendre à être seule." Elle y rencontre pourtant deux figures clés, Nils, un peintre percevant l’existence différement, et Yasha, un autre être en rupture. Ce dernier atterrit là pour exaucer le dernier vœu de son père : "Laponie, Sommet du monde, La paix pour de vrai." A l’heure où il vient de mourir, son fils replonge dans ses souvenirs. Ceux d’un gamin immigré, aspirant à devenir américain. Il grandit auprès de son père, boulanger qui souffre d’une insuffisance cardiaque. Mais il lui apprend à pétrir le pain comme la vie. Celle-ci renaît en lui grâce à l’amour de Frances. Derrière le ton faussement désinvolte, voire girly, l’auteure livre une tragie-comédie. Une envie d’ailleurs qui correspond à une quête de soi. K. E.
Rebecca Dinerstein, Comment être seul, Actes Sud. Traduit de l’angalis (États-Unis) par Caroline Nicolas. Tirage : 5 000 ex. Prix : 22 euros ; 320 p. ISBN : 978-2-330-06426-6.
