S'ils ne vont pas jusqu'à rendre les jurys responsables des médiocres performances commerciales de la rentrée littéraire 2018, c'est peu dire que de nombreux libraires et éditeurs ont été déroutés par les premières sélections des grands prix d'automne. L'émotion qui a saisi les libraires à l'apparition, dans la première sélection du prix Renaudot, d'un titre autoédité - Bande de Français de Marco Koskas -, uniquement disponible chez Amazon, ne constituait que la face émergée de l'iceberg. Beaucoup n'ont pas compris que les jurys ignorent, pour l'essentiel, les titres des auteurs les plus porteurs de la rentrée.

Passe encore qu'ils aient négligé le nouveau roman de Jérôme Ferrari, déjà auréolé d'un Goncourt. Mais quid de ceux de Maylis de Kerangal, Serge Joncour, Yasmina Khadra, Alain Mabanckou ou encore Amélie Nothomb, à ce jour la meilleure vente de la rentrée littéraire ? Les éditeurs et les libraires n'ont souvent pas non plus compris que, après avoir braqué les projecteurs sur des primo-romancières telles Adeline Dieudonné ou Pauline Delabroy-Allard, les jurés les laissent choir au fil des sélections, alors que leurs ventes décollaient.

Les palmarès ne les déconcertent pas moins. Le très mérité prix Médicis à Pierre Guyotat mis à part, ils privilégient les outsiders. Mais en décernant le Goncourt et le Renaudot aux deuxièmes romans de Nicolas Mathieu et de Valérie Manteau, ou encore le Femina au puissant récit de Philippe Lançon, les jurys ont fait preuve d'initiative, d'ouverture et de courage, confirmant que les grands prix littéraires français sont entrés dans une nouvelle ère où la découverte et le rajeunissement sont aux postes de commande. Force est de constater qu'Actes Sud y occupe une position centrale : parmi les sept derniers prix Goncourt, la maison arlésienne en a raflé quatre, en 2012 (Jérôme Ferrari), 2015 (Mathias Enard), 2017 (Eric Vuillard) et 2018 (Nicolas Mathieu). Chapeau !

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