6 février > Nouvelles Etats-Unis

Chinelo Okparanta est née en 1981 au Nigeria mais est arrivée aux Etats-Unis avec sa famille à l’âge de 10 ans. Elle appartient donc à cette catégorie d’écrivains africains, et plus précisément d’écrivaines africaines - on pense notamment à Sefi Atta (Le meilleur reste à venir, Actes Sud, 2009 ; Nouvelles du pays, Actes Sud, 2012) -, qui construisent leur œuvre dans un espace mondialisé et dont l’écriture métisse par ses thèmes et sa forme des identités multiples.

Dans ce premier recueil de dix nouvelles, les histoires se répartissent donc entre la région de Port Harcourt, sur le golfe du Niger, défiguré par l’exploitation intensive du pétrole, et l’est des Etats-Unis. "L’Amérique" fait le lien, abordant la question de l’expatriation et, largement plus taboue, de l’homosexualité féminine (également évoquée sans ambiguïté dans "Grace") dans un pays où elle est condamnée. De façon plus générale, Okparanta observe avec une gravité jamais démonstrative les relations entre les hommes et les femmes mais aussi entre des filles, souvent narratrices du récit, et leur mère. Ces mères qui, parfois plus encore que leur mari, apparaissent comme gardiennes voire complices d’un ordre conjugal et social traditionnel violent, appuyé sur des croyances religieuses et superstitieuses : ainsi cette veuve qui encourage sa fille à épouser un ingénieur de Shell témoin de Jéhovah. Une autre qui assiste avec son gendre à une séance de désenvoûtement destiné à rendre sa fille fertile ou cette mère de la bourgeoisie aisée fournissant à son adolescente des crèmes pour blanchir sa peau…

Dans son anglais syncrétique, simple et vif, qui intègre des mots concrets du quotidien (vêtements, aliments…), traduits dans un glossaire en fin de livre, Chinelo Okparanta amplifie les voix de filles combatives qui tentent d’assumer leurs choix de vie sans sacrifier leur culture d’origine. V. R.

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