Dix ans après Taxista, Cornélius publie, pour la première fois en français depuis sa création il y a trente ans, un autre ouvrage majeur de Marti Riera, dit Marti. Né en 1955, le précurseur de la bande dessinée alternative espagnole, très influencé dans son système narratif et son expression graphique par la BD américaine underground de Crumb ou de Charles Burns, a été une des figures de la revue d’avant-garde El Vibora. Dans Docteur Vertigo, il décrit avec une rare violence la condition faite aux femmes dans une Espagne à peine libérée du franquisme et profondément imprégnée par la morale chrétienne.

Au centre du récit, Alicia est une femme au foyer de 34 ans délaissée par son mari. Luciano la trompe. En pleine dépression, rongée par la culpabilité, la jeune femme consulte d’abord le professeur Trauman. Celui-ci se révèle un manipulateur de première grandeur et la projette dans un véritable cauchemar: décervelage, endoctrinement, viols en série. Entre alors en scène le Docteur Vertigo. Mais ce psychiatre aux méthodes pour le moins singulières va, au motif de la cure, exacerber la violence subie au quotidien et depuis son enfance par Alicia. Marti livre un panorama radical de la condition faite aux Espagnoles des années 1980. Fabrice Piault