24 août > Premier roman France

De l’influence de la météorologie sur la carte de Tendre : les corps pris dans la moiteur de la saison des pluies ne réagissent pas pareil que sous des latitudes tempérées, l’indolence invite au lent éveil des sens, lent mais persistant. A quoi s’ajoute l’ennui de personnes que le travail ne préoccupe guère. L’éveil, le premier roman de Line Papin, aurait pu s’intituler L’amour à la mousson, en l’espèce, les tièdes averses d’Hanoi. Il raconte les pérégrinations existentielles et sentimentales de jeunes gens expatriés dans la capitale vietnamienne. La fille de l’ambassadeur d’Australie se retrouve un peu par hasard au milieu d’une fête de "vieux", l’anniversaire du directeur de l’Institut français. Dans le conformisme ambiant des "expat’" apparaît une attractive silhouette : "lui, l’homme désert aux yeux jaunes, qui dans[e], si loin". La vierge rebelle le suit chez lui, rien ne se passe cette première nuit. Une autre suivra où viendra l’éveil, à l’amour mais aussi à ce drôle d’abîme au-dessus duquel ce jeune homme triste semble glisser, à la beauté d’une ville enfin. Hanoi tout à coup revisitée avec et à travers les yeux de l’amant imprégné de culture locale, son tumulte, sa rumeur, ses odeurs : "Oui, nous y étions à deux, nous nous noyions à deux dans ce flot, et chaque jour montait l’amour que j’ai pour lui, je l’aimais avec la chaleur, avec les palmes, avec l’orage de la première soirée ; avec les ruelles sombres de la première nuit […]." Juliet découvre que l’homme au regard d’or est un ancien serveur du restaurant français de la ville, où travaille son meilleur ami, Raphaël, un sympathique flambeur ; qu’il aime lire et lit tout le temps comme celle qui fut son amante avant elle, Laura, une libertine libertaire qui comblait son nihilisme par un excès d’alcool et de sexe. L’éveil est un ambitieux premier roman, une charmante polyphonie à la sensualité hiératique. S. J. R.

27.05 2016

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