2 mai > Roman France

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Contrairement à ce qu’affiche le titre de la collection « Ceci n’est pas un fait divers », à laquelle Didier Decoin donne aujourd’hui un deuxième livre, La pendue de Londres est un fait divers authentique, et des plus tristes. L’histoire d’une malheureuse jeune femme, devenue assassin par amour, reconnue coupable, condamnée à la peine de mort, et pendue par un brave type, un bourreau compatissant mais consciencieux. Qui quittera sa charge d’exécuteur en chef de Londres peu après.

Didier Decoin en a fait un roman, « et le revendique absolument », construit de manière habile, selon le principe des destinées parallèles qui finissent par se rencontrer. Albert Pierrepoint, fils et neveu de bourreau, est un être ponctuel, méticuleux. Et discret : sa propre femme, Annie, avec qui il tient un pub sur Manchester Road, ignorera longtemps son second métier. Pourtant, après la guerre, il a eu son heure de gloire, appelé à exécuter pas moins de treize nazis condamnés à mort, dont une toute jeune femme, Irma Grese. Un monstre. Mais le bourreau, qui est un être sensible, en a été bouleversé. C’est dire si, dix ans plus tard, le 13 juillet 1955, ce n’est pas de gaîté de cœur qu’il a passé la corde au cou de la charmante Ruth Ellis, une blonde peroxydée de 29 ans avec des faux airs de Marilyn, accusée d’avoir tué son amant, David Blakely, une espèce de gigolo infidèle et violent, de plusieurs coups de pistolet, avec préméditation. En dépit d’une campagne d’opinion en sa faveur, de manifestations, de pétitions, menées à la fois par des citoyens compatissants et par les abolitionnistes, Sa Majesté la jeune reine Elizabeth II a refusé de commuer la peine. Pierrepont accomplit donc son devoir, en s’assurant que Ruth ne souffre pas. Puis, en 1956, il quitte sa charge. La peine de mort sera abolie au Royaume-Uni en 1969.

Au fil de ce qui s’apparente à une enquête, Didier Decoin retrace la destinée calamiteuse de Ruth, née Neilson, en 1926. Violée par son père, fille-mère abandonnée par le soldat canadien qui lui a fait une fille, Georgina, devenue modèle posant nue, puis entraîneuse et plus ou moins prostituée, elle est tombée sur plusieurs salopards, dont George Ellis, un dentiste fou, ivrogne et cogneur, qu’elle a quand même épousé. Puis David Blakely, coureur automobile déjà fiancé par ailleurs. Ou encore Desmond Cussen, l’ami-amant jaloux et manipulateur, celui qui lui a fourni le revolver fatal et lui a appris à s’en servir. Mais, au procès, Ruth n’a pas voulu le dénoncer, comme si elle avait choisi d’en finir avec sa vie, qu’on dirait tout droit sortie d’un roman de Dickens. Ou de Decoin, donc, aujourd’hui, qui raconte Ruth avec empathie, Pierrepoint avec bienveillance, et en profite pour exprimer son horreur de la peine capitale, surtout infligée si injustement.

J.-C. P.

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