SYMPOSIUM

Au micro, Richard Charkin, directeur exécutif de Bloomsbury (Royaume-Uni).- Photo MARIANNE TOUCHARD-HEYMAN/BIEF

"Il ne faut pas croire que l'édition qu'on a connue jusqu'ici est obsolète", plaide Roberto Calasso. Le P-DG d'Adelphi (Italie) est, le 1er décembre au Sénat, à Paris, le premier de 15 éditeurs de 8 pays à intervenir lors du symposium organisé par le Bureau international de l'édition française (Bief) et le Syndicat national de l'édition (SNE) et clôturé par le ministre de la Culture, Frédéric Mitterrand. Mais, tout en défendant leur métier, les 70 éditeurs présents affichent plus de préoccupations que d'optimisme. D'après le Néerlandais Koen Clement (WPG), dont le marché a chuté de 10 % depuis janvier, "la situation est grave mais pas désespérée". En Pologne, dit Piotr Marciszuk (Stentor), "il est difficile de se faire payer par les détaillants". En Suède, selon Dag Hernried (Alfabeta), "les chaînes perdent beaucoup d'argent sans savoir quoi faire". Là-bas pourtant, rappelle la P-DG de Bonnier, Eva Bonnier, "les éditeurs sont attachés au prix libre". Comme aux Pays-Bas où, pour Herman Pabbruwe (Brill), "le prix fixe n'a aucun intérêt". Au grand dam d'Arnaud Nourry (Hachette), qui ne veut "pas toucher à l'écosystème français, et même l'exporter un peu".

Les libraires indépendants sont aussi sinistrés. "Au Royaume-Uni, ils n'assurent plus que 4 % des ventes", pointe Richard Charkin (Bloomsbury, sur la photo). "De manière aberrante, ils peuvent se procurer des livres moins chers chez Amazon ou Tesco que chez nous", renchérit Pete Ayrton (Serpent's Tail), alors que Michael Krüger (Carl Hanser, Allemagne) note qu'"on dit toujours qu'on aime les libraires, mais on ne fait pas grand-chose pour eux".

Plus que la conjoncture, les changements structurels inquiètent les éditeurs. "Qu'arrive-t-il aux lecteurs ?, demande l'Espagnol Jaume Vallcorba (Acantilado). Selon ma libraire, les vieux sont morts et ne sont pas remplacés par des jeunes." Son compatriote José Badenes (Planeta) invite les éditeurs à formuler "une offre plus créative vers les nouveaux lecteurs". "Il manque une élite culturelle", déplore l'Italien Stefano Mauri (Mauri Spagnol). En Pologne, Barbara Jozwiak (PWN) pointe les dégâts du progrès : "Les consommateurs attendent tout gratuit sur Internet, le piratage s'intensifie, les auteurs se perdent dans les nouveaux supports et demandent plus de droits, les éditeurs subissent des coûts nouveaux, des détaillants se lancent dans l'édition." Koen Clement suggère de "remettre en cause les fondements de notre métier. Pourquoi le libraire en ligne en sait plus que nous sur nos clients ? Quand renoncerons-nous au système obsolète du droit de retour ?" demande-t-il. "Tous les livres qui paraissent sont-ils nécessaires ?" interroge aussi Michael Krüger. Pour le président du SNE, Antoine Gallimard, toutefois, "n'oublions pas que nos catalogues sont des socles de l'Europe culturelle".

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