États-Unis

Les lois du gouverneur DeSantis vident la Floride de ses livres

La librairie de la SJC School District (St. Augustine en Floride) - Heather Schatz (Twitter)

Les lois du gouverneur DeSantis vident la Floride de ses livres

Depuis juillet dernier, trois lois portées par le gouverneur républicain de Floride Ron DeSantis contraignent les bibliothèques scolaires à écarter tous les livres jugés non conformes par les ultra-conservateurs.

J’achète l’article 1.5 €

Par Adriano Tiniscopa,
Créé le 15.02.2023 à 17h45

Dans l'État de Floride, la « loi sur les droits parentaux en matière d'éducation », celle sur le « Wrong to Ours Kids and Employees (W.O.K.E) » ("Tort envers nos enfants et employés"), et la loi « HB1467 » défendues par le républicain ultra-conservateur Ron DeSantis, en vigueur depuis le 1er juillet 2022, contraignent les établissements scolaires à vider leurs bibliothèques. 

La « loi sur les droits parentaux en matière d'éducation », que ses détracteurs surnomment le « Don't Say Gay Act »  interdit aux professeurs d'évoquer les questions de genre et d'orientation sexuelle dans leur cours jusqu'en classe de CE2 sous peine de 2 à 10 ans de prison. Le « Wrong to Ours Kids and Employees (W.O.K.E), considéré comme le « Stop Woke Act », les empêche d'aborder les théories critiques de la race et du sexe à l'école comme à l'université. La loi « HB1467 » oblige les chefs d'établissement à purger leurs bibliothèques et à publier un catalogue conforme sur leur site.  Par ailleurs, parents et publics peuvent signaler tous les ouvrages considérés comme illicites. 

Une censure qui touche 4 millions d'élèves

Les témoignages des conséquences des ces lois abondent : des images montrent des rayons de librairies vides, des listes de livres autorisés, et l'organisation Pen America a recueilli la parole de professeurs qui font cours sans livres... « Ils ont retiré tous les livres de la classe de mon enfance en attendant qu'ils soient examinés et validés...», explique Brian Covey, entrepreneur et professeur suppléant à la Duval County Public School, à Jacksonville (Floride). Même son de cloche à la St. Johns County School District à Saint-Augustin où la journaliste américaine Heather Schatz y a pris un cliché montrant les rayonnages vides et commentant « Ceci est une bibliothèque de lycée ».

Depuis plusieurs semaines, tous les ouvrages des établissements scolaires de Floride doivent passer le check-up de « spécialistes des médias formés » chargés de contrôler si les livres comprennent du contenu pornographique ou s'ils sont  « adaptés aux besoins des étudiants ». Un examen, qui à la Duval County Public, prend 10 minutes pour chaque ouvrage. À ce rythme,  « il faudrait 2 ans et demi pour analyser les 1,6 million de titres dont regorge l'établissement », estime Brian Covey. « Cette loi est si floue que ces spécialistes ont été autorisés à "pêcher par excès de prudence. »

« Voir tous ces rayons de l'école de mon enfant vides c'est dystopique pour moi et difficile à croire », déplore-t-il. Une plateforme pour recueillir toutes les pétitions et aider à la mise en place d'actions locales contre les interdictions de livres a été lancée. En 2022, Pen America a déjà publié la liste des 1648 titres bannis entre 2021 et 2022 aux États-Unis (en raison de leurs thèmes LGBTQ+, de leurs questions portant sur la race et le racisme, ou de leur contenu sexuel...) et toujours pas réintégrés. Une censure qui touche 5049 écoles et 4 millions d'élèves et étudiants.

Les dernières
actualités