ENCADRÉ 1
TITRE / Papier : en quête de transparence
Les labels FSC et PEFC sont-ils suffisants ? Pas vraiment. "Ils concernent la chaîne de traçabilité sur les forêts. On pense souvent que ces papiers sont mieux fabriqués, alors qu'ils peuvent être bourrés de produits chimiques", indique Camille Poulain, de l'atelier de fabrication Lichen. À la fin de l'année, un règlement européen contre la déforestation et la dégradation des forêts (RDUE) entre en vigueur, Benoît Moreau s'interroge : "La RDUE traduit-elle un échec de ces certifications ? Si elles étaient efficaces, ce texte ne serait peut-être pas nécessaire..."
Peut-on savoir d'où vient le papier ? Très difficilement. La provenance des fibres est souvent impossible à identifier car les papetiers mélangent diverses fibres aux propriétés spécifiques. "Dans un même papier, on peut avoir des fibres venant de treize endroits différents", assure Camille Poulain. Par ailleurs, tous les fabricants ne mettent pas facilement à disposition le paper profile (la déclaration environnementale des papiers). "Quand c'est trop opaque, il vaut mieux éviter d'utiliser ces papiers, mais ce degré d'exigence n'est pas évident à mettre en place", estime Guillaume Duprat, directeur artistique d'Ulmer.
Le papier recyclé, une panacée ? "Pour répondre aux critères de l'éditeur, un papier recyclé peut être surtraité, la fibre de bois étant remplacée par des produits chimiques", observe Benoît Moreau d'Ecograf. Par ailleurs, "la fibre est le plus souvent rachetée à des recycleurs principalement situés en Allemagne et en Autriche ; or ce ne sont pas les pays les moins carbonés en Europe", pointe Camille Poulain.
ENCADRÉ 2
TITRE / Encres : la grande conversion
Quels sont les types d'encres offset ? Les encres à base d'huile minérale contiennent des composés nocifs pour la santé et seront, pour la plupart, interdites à partir de 2025. Les encres à base d'huile végétale ne sont pas toxiques, mais pas écologiques pour autant. "Ça peut être de l'huile de palme ou de l'huile de soja OGM", cite en exemple Camille Poulain de l'agence Lichen. "Pour l'offset à plat, 95 % des encres en Europe sont à base d'huile végétale, mais ce n'est pas du tout le cas pour l'offset rotative, notamment parce qu'on n'arrive pas à les faire sécher", indique l'experte. Face à la réglementation européenne sur l'interdiction des encres minérales, de nombreux imprimeurs adoptent les encres "blanches", labellisées "Blue Angel". Composées d'huiles minérales, elles ne contiennent pas de composés suspectés d'être cancérigènes.
Et les encres UV ? Compatibles avec l'impression offset rotative et à plat, les encres UV ont l'avantage de sécher instantanément en présence de rayonnement UV, permettant d'accélérer la fabrication. "En vue du recyclage, certaines sont désencrables, mais toujours plus difficilement que des encres traditionnelles", note Camille Poulain.
Comment limiter l'encrage ? "La couleur sur les couvertures est amenée par du papier qui est teinté dans la masse directement par le papetier. Ce n'est pas du papier blanc sur lequel on monte différentes couleurs", illustre Florence Boudet, directrice artistique des éditions La Mer salée.
ENCADRÉ 3
TITRE / Pelliculage : la touche finale à repenser
Existe-t-il des alternatives aux pelliculages plastiques traditionnels ? De plus en plus. "Il y a cinq ans, notre imprimeur commençait à disposer de solutions plus écologiques mais elles étaient hors de prix. Depuis un an, les choses bougent", souligne Guillaume Duprat, directeur artistique d'Ulmer. Pour leurs brochés, l'imprimeur utilise un pelliculage à partir de plastique biosourcé, le PLA (acide polylactique), produit à partir d'amidon végétal (souvent du maïs). "Outre son origine végétale, le PLA émettrait jusqu'à 80 % de CO2 de moins qu'un plastique traditionnel", précise Anthony Gachet, responsable commercial de la maison. Le tout pour un surcoût de l'ordre de 0,05 € par exemplaire.
Peut-on se passer totalement de pelliculage ? Oui. "Le livre est ainsi plus facilement recyclable. Même si cela fragilise un peu l'objet, j'aime l'idée qu'un livre puisse porter des traces de vie", explique Florence Boudet, pour La Mer salée. "Nous imprimons de plus en plus de livres sur du papier recyclé sans pelliculage. Mais ils s'abîment plus vite, ce qui déplaît aux libraires. Il y a donc un équilibre à trouver", estime Guillaume Duprat. "Depuis cette année, nous imprimons sur des cartes retournées : au lieu d'utiliser le côté lisse, nous imprimons sur le côté rugueux, ce qui évite de mettre un pelliculage", poursuit le directeur artistique.
Le zéro pelliculage, est-ce toujours bénéfique ? Pas nécessairement. "Si on met un pelliculage par atavisme, ça n'a pas de sens. Mais si le pelliculage allonge la durée de vie d'un livre, c'est une bonne idée", résume Benoît Moreau, fondateur d'Ecograf.
ENCADRÉ 4
TITRE / Transport : les lois de la proximité
Avion, bateau, train, route ? Cela dépend. Dans l'idéal, mieux vaut éviter le transport par avion. Le transport routier est à privilégier pour de courtes distances. "Un imprimeur en Lettonie a commandé du papier recyclé dans le milieu de l'Italie, qu'il a ensuite rapatrié en camion. Il estime proposer un produit écolo, mais pas du tout !", illustre Benoît Moreau. Il ajoute par ailleurs que les maisons françaises peuvent s'appuyer sur "des papiers suédois très bas carbone qui peuvent être intéressants s'ils sont transportés par bateau". À l'heure où le tourisme ferroviaire a le vent en poupe, ce mode de transport serait-il l'idéal ? Peut-être. Mais "le fret étant sous-développé, avec Printer Trento, nous n'avons pas réussi à mettre une voie d'acheminement par train", regrette Anthony Gachet, responsable administratif et commercial chez Ulmer.
Production locale ? Autant que possible. Pour illustrer la logique de proximité, primordiale dans une démarche écologique, Benoît Moreau dessine souvent des cartes pour ses clients : "Il faut avoir le triptyque papeterie-imprimeur-centre de stockage en tête." Plus le triangle est petit, plus la production est écologique. "Et plus on imprime en étant proches des papetiers, moins on a de déchets. D'où l'importance d'avoir des usines à papier en France", pointe-t-il. C. L. et S. L.
