Mirabelle est un joli prénom. Mais quand il est assorti du nom de famille Prunier, les mauvaises langues de l'école trouvent que ça commence à faire beaucoup... Dans la cour de récré, ce ne sont pas des noms d'oiseaux qui pleuvent sur la fillette au nom de fruit doré, mais des moqueries et des quolibets. Au début, elle fait le dos rond, encaisse les coups bas. À la fin, elle s'isole à l'orée du village sur un tertre stérile et noir. Là, elle trouve refuge et prend racine. Pas seulement au sens figuré... Ses jambes se lient pour former un tronc d'arbre et sa peau s'endurcit jusqu'à devenir une écorce. Mettons cela sur le dos de la prémonition des noms propres...

Pour donner sens à son existence solitaire, Mirabelle Prunier est devenu un bel arbre fruitier qui change au gré des saisons. Perdu et reclus dans le silence du vaste hiver où il se recueille en attendant le renouveau, souriant et couvert de jolies fleurs roses au printemps. L'été, il donne une ribambelle de mirabelles aux joues rebondies et colorées comme celles de Mirabelle Prunier. Morale de l'histoire, la mauvaise graine peut parfois donner de bons fruits- belle allégorie de la résilience ! Les illustrations à la fois tendres et éclatantes de Nathalie Choux adoucissent le propos sombre du rejet et de l'isolement et s'accordent à merveille avec cette métamorphose à haute teneur poétique, celle d'une petite fille en arbre.

Henri Meunier, Nathalie Choux
Mirabelle Prunier
ROUERGUE
Tirage: 2 700 ex.
Prix: 16 € ; 40 pages
ISBN: 9782812620638

La nuit au musée

L'incendie du musée de Rio revu par Gilles Baum et Régis Lejonc dans un album empreint de saudade.

Photo ÉDITIONS DES ÉLÉPHANTS

Edson Arantes en a gros sur la patate. Le gardien du musée ajuste une dernière fois sa casquette, fait tinter sa cloche. Fechàmos. On ferme. Les collections poussiéreuses n'attirent plus le chaland, le musée de Rio n'a plus d'argent. C'est fini. Seul le silence résonne encore au milieu des toiles d'araignée et des plinthes vermoulues. Et la nostalgie... Arantes se souvient des hordes d'enfants visiteurs du temps de la splendeur du musée. Mais il est temps de desserrer sa cravate et déboutonner la veste de son uniforme. Étrangement, il n'en fait rien. Il se rend à l'arrière du musée, là où il a donné rendez-vous à une poignée de passionnés. La visite de nuit peut commencer. Le sauvetage aussi... C'est un crève-cœur pour les habitués de choisir. On voudrait tout emporter. Le crâne du premier homme comme la collection de papillons et les masques ticunas. Cinq des fils d'Arantes enlèvent la grande météorite qui a tutoyé les étoiles pour l'emmener dans leur favela, tandis que Bianca et Ana Luisa choisissent un sarcophage plus léger qu'il n'en a l'air. Et l'immense Maxa le dinosaure, alors ? Chacun pourrait emmener une dizaine d'os... Grâce au gardien, les œuvres vont vivre une seconde vie, à ciel ouvert dans la promiscuité des favelas et parmi les rires des enfants. Aux confins de la bande dessinée, cet album prend pour point de départ un fait réel, l'incendie du Musée national de Rio de Janeiro. On aime la saudade qui le nimbe, et ce gardien mélancolique et doux, hors la loi mais sauveteur du Beau.

Gilles Baum, Régis Lejonc
Fechamos
ÉDITIONS DES ÉLÉPHANTS
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 15 € ; 36 pages
ISBN: 9782372730914

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