1. Mettre en place une taxe sur le pilon

2. Imaginer un outil de surdiffusion commun à tous les éditeurs, compilant l'ensemble des « à paraître »

3. Produire, en se réunissant entre libraires, un spot de publicité télévisé pour promouvoir la librairie indépendante

4. Créer une taxe sur les livres d'occasion alimentant un fonds dédié aux auteurs

5. Mettre au point une application de lecture pour les jeunes, avec des formats littéraires et graphiques courts et innovants

6. Définir une politique de commandes publiques ambitieuse, favorisant les structures les plus fragiles

7. Appliquer une remise unique à l'ensemble des librairies sans distinction de taille, supérieure pour les librairies physiques par rapport aux revendeurs sans lieu d'accueil du public, et avec un niveau plancher minimum de 37 %

Vincent Chabault

Sociologue de la consommation et auteur d'ouvrages sur le commerce du livre, Vincent Chabault analyse les remous créés par la fermeture des librairies pendant le confinement.

Avez-vous été surpris par la polémique suscitée par l'appel du SLF à la fermeture des librairies ?

Sociologue Ma"tre de confŽrences Univ. Paris Descartes Responsable Licence pro Ždition, commerce du livre, bibliothque Livre, Librairie, Commerce du livre - Vincent Chabault - Vincent Chabault- Photo OLIVIER DION - ©OLIVIER DION - OLIVIER DION

Je me pose en observateur : je crois que chacun est dans son rôle. Un syndicat professionnel livre sa position argumentée, échange avec le ministère qui a dressé la liste des commerces « essentiels » ; des commerçants indépendants suivent ou non les directives du SLF, et décident d'assurer un service autorisé de commandes, de retrait et de livraison.

Fallait-il considérer le livre comme un « bien de première nécessité » ?

C'est un faux débat. Les résultats de l'enquête menée par le ministère de la Culture sur les pratiques culturelles indiquent que 48 % des Français n'ont pas lu de livre en 2018 contre 27 % en 1988. La lecture peut aider à traverser ce moment pénible, mais beaucoup de Français possèdent une bibliothèque et ont pu se procurer des livres numériques. La lecture n'était pas interdite !

Maintenir un service minimum en librairie, n'était-ce pas l'occasion de s'éloigner de l'accoutumance aux plateformes que vous constatez dans Éloge du magasin (1) ?

Oui, éventuellement, mais ce sont des commerces indépendants, et c'était à eux de prendre leur décision. Par ailleurs, la librairie n'accuse pas de retard sur les services numériques : les portails existent pour la réservation en boutique ou la commande. Le service numérique en soutien au magasin constitue à mes yeux une « bonne » consommation en ligne.

Comment expliquer la vague de soutien aux librairies, malgré un poids économique en baisse dans les circuits de vente ?

Il s'agit d'un commerce que chacun sait fragile. Il a été le premier à avoir été exposé à l'« amazonisation ». L'enjeu est de transformer cette attitude bienveillante en pratique d'achat exclusive. Chacun doit sortir par le haut d'une contradiction : se satisfaire d'une livraison à domicile... et déplorer la fermeture des magasins.

Y a-t-il de nouvelles pistes à explorer pour fidéliser sa clientèle ?

L'urgence est d'inscrire le livre dans la culture numérique. L'enquête sur les pratiques culturelles des Français identifie deux pôles de consommation : la culture patrimoniale (musée, lecture, théâtre...) et la culture numérique liée à internet. Le livre et les librairies doivent trouver leur place dans ce second univers qui explose alors que le premier décline. La première pratique culturelle des 15-24 ans est le visionnage de vidéos en ligne. S'adresser à eux constitue une priorité absolue.

(1) Éloge du magasin, par Vincent Chabault, Gallimard, 2020.

21.09 2020

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