12 janvier > Roman France

Il n’était qu’un parmi d’autres. Parmi des millions d’autres, tombés au champ d’honneur durant la Première Guerre mondiale. Simplement, parce qu’il était trop jeune, parce que le nom qu’il portait aurait dû le prémunir de toute fascination guerrière, lui n’aurait jamais dû rejoindre ce terrible cortège.

Jean-Emmanuel Ducoin- Photo DR

Engagé volontaire à l’âge de 16 ans, Louis Jaurès est mort au front le 3 juin 1918 sur le Chemin des Dames. Il était le fils de l’incarnation tragique du pacifisme, Jean Jaurès. De lui on ne sait rien, quelques lignes seulement dans toute la biographie du grand homme, et surtout pas pourquoi il fut si ardent à se mêler au massacre que son père pressentait.

Jean-Emmanuel Ducoin, que l’on sait depuis son très beau Go Lance ! (Fayard, 2013) attiré par l’ambivalence des êtres, a mené l’enquête. Il le fait moins en journaliste qu’en romancier, dans le compagnonnage de ce jeune mort mystérieux. On le suit à chaque étape du sacrifice de Louis Jaurès, dans l’inflexible ardeur de sa jeunesse et de sa volonté de démontrer par l’exemple que les idées de son père, qu’il partage, ne sauraient être confondues avec une quelconque lâcheté. On le voit imposer peu à peu à ses camarades son charisme humaniste, on l’imagine croisant dans les tranchées le fils, à peine plus âgé que lui, de Maurice Barrès qui fut le grand contradicteur de Jaurès. Ducoin entrecoupe chaque chapitre de cette "biographie rêveuse" par le récit de sa propre enquête, à l’heure où sa vie personnelle paraît un peu effilochée (il est question d’un couple qui se sépare, d’un homme qui ne sait plus rester chez lui)… Bien entendu, cherchant Louis, au bout de son chemin de gloire et de souffrance, il trouvera Jean-Emmanuel. L’un ne sera plus jamais seul, l’autre, sans doute, l’est un peu moins. O. M.

Les dernières
actualités